o Coordonner la prévention des inondations en zone rurale

Des travaux sont en cours dans le cadre de la commission mixte inondation afin de faciliter la prise en compte de l’activité agricole et des espaces naturels dans la gestion des risques d’inondation.

Question de Cathy Apourceau-Poly, sénatrice (CRCE) du Pas-de-Calais :

Dans mon département aussi, sous l’effet du changement climatique, les épisodes de sécheresse succèdent aux pluies diluviennes, qui lessivent les sols et provoquent des mouvements de terrain, des coulées de boue et des destructions matérielles importantes. Les zones rurales sont particulièrement touchées, mais souvent ignorées. Je pense ainsi à la vallée de la Canche, où une dizaine de communes ont encore été affectées au printemps dernier.

Si l’extension urbaine, qui implique l’artificialisation des sols, est l’une des causes premières des inondations et des coulées de boue, ce n’est pas le cas de nos campagnes, où les problèmes sont davantage dus au défaut de pilotage et au manque de moyens pour l’aménagement du territoire et la concertation. Quand les exploitants agricoles sont majoritairement en fermage, donc pas propriétaires des terres qu’ils exploitent, qui doit intervenir pour rétablir les obstacles empêchant le lessivage des sols ?

Vous avez bien fait de créer des lignes budgétaires dans le plan de relance pour les propriétaires fonciers. Toutefois, cela retire aux élus locaux la maîtrise de l’aménagement du territoire. Les maires, qui ont une vue d’ensemble de l’aménagement du territoire, ne sont pas consultés et n’ont pas de pouvoir pour mener des travaux d’entretien des fossés et des noues, et pour replanter des haies sur les terrains privés.

La gestion des bassins versants n’est pas du ressort des agriculteurs

De nombreux acteurs travaillent isolément sur ces questions, ce qui rend inefficace la prévention des inondations. Plus problématique encore, l’absence de concertation induit des incompréhensions entre les exploitants, les pouvoirs publics et la collectivité. On a donc, d’un côté, des techniciens performants, mais non coordonnés, et, de l’autre, des élus volontaires, mais dépourvus de moyens, et des exploitants dont le rôle n’est pas la gestion des bassins versants.

Pour appliquer une politique efficace de prévention des inondations, il faut un chef d’orchestre. Les maires sont des candidats tout désignés pour ce rôle, mais le transfert de compétences en matière d’urbanisme aux établissements publics de coopération intercommunale dépossède encore plus les communes, tandis que la mécanique de la taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations, dite taxe Gemapi, casse toute solidarité nationale. Il faut redonner des moyens à la puissance publique locale. Quels leviers peuvent être mis à la disposition des élus locaux pour leur permettre d’agir ?

Réponse de la secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité :

Les collectivités disposent de plusieurs leviers en matière de prévention des inondations. Soutenues financièrement par l’État, elles peuvent élaborer des programmes d’action de prévention des inondations (Papi), pour mettre en place une stratégie globale de gestion du risque, y compris du risque d’inondation exceptionnelle par ruissellement, et bénéficier ainsi d’un cofinancement du fonds Barnier.

Nous avons également souhaité accroître les moyens de la prévention des inondations pour soutenir encore plus les collectivités. Les ressources du fonds Barnier ont été augmentées, dès cette année, de 56 %, et portées à 205 M. Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2022, nous prévoyons d’augmenter encore les ressources de ce fonds de 30 M. Le soutien financier de l’État aux porteurs de projets pour l’animation des Papi a été revalorisé. Par ailleurs, la labellisation a été simplifiée.

En outre, dans le cadre de la Gemapi, les collectivités peuvent engager toute action qu’elles jugent nécessaire afin de prévenir les inondations, y compris celles qui sont causées par ruissellement. Ces actions peuvent être financées à travers la taxe Gemapi. À l’échelon national, des travaux sont en cours dans le cadre de la commission mixte inondation afin de faciliter la prise en compte de l’activité agricole et des espaces naturels dans la gestion des risques d’inondation.

Dans les Hauts-de-France, nos services s’engagent dans ces actions concrètes, qui doivent nous permettre de mieux connaître les origines et les phénomènes de ruissellement. En outre, un effort sera engagé pour mieux informer sur les différents dispositifs financiers mobilisables, dont le fonds Barnier, les fonds européens, les aides des agences de l’eau, les mesures soutenues par la politique agricole commune et le volet « implantation de haies » du plan de relance.

En parallèle, la chambre d’agriculture des Hauts-de-France accompagne les exploitants agricoles. En 2018, elle a publié un guide sur la lutte contre le ruissellement et l’érosion des terres agricoles. Comme vous l’avez souligné, c’est une question de mobilisation et de concertation : il faut un travail commun entre les collectivités et les acteurs du territoire.

JO Sénat CR, 29 sept. 2021, p. 8423.

Retour