Dépollution de l’usine Synthexim à Calais

La société mère s’est rendue injoignable et insolvable, mais l’État n’a pas l’intention de se laisser faire. Pour l’instant, l’urgence est de conditionner, de retirer et de traiter près de 2 000 tonnes de déchets industriels, dont certains très dangereux.

Question de Pierre-Henri Dumont, député (LR) du Pas-de-Calais :

Les habitants de ma circonscription sont inquiets, car une bombe industrielle et environnementale se trouve en plein cœur de Calais, à proximité immédiate des habitations et d’un canal. Le 31 mai dernier, l’usine chimique Synthexim, classée Seveso seuil haut, propriété du groupe Axyntis, a été placée en liquidation judiciaire, ses 120 employés licenciés emportant avec eux leur connaissance du site.

Depuis, la direction d’Axyntis refuse non seulement de se plier à la loi en remettant en état ce site de 24 hectares, mais se montre également incapable de donner la liste des produits chimiques stockés dans des fûts en plein air. Cet été déjà, deux incidents ont été constatés, sous la forme d’émanations suspectes de fumées.

1 900 t de déchets dont du brome et du cyanure

Sur le site se trouvent désormais 1 900 tonnes de déchets dont la plupart ne sont pas encore identifiés. Nous connaissons néanmoins quelques-uns des produits les plus dangereux entreposés au grand air : 15 tonnes d’amphétamines, 350 kilogrammes de brome et 69 tonnes de cyanure. Si les amphétamines ont été évacuées lors des dernières semaines, le reste des composés chimiques présents sur site fait craindre une catastrophe industrielle et environnementale.

Si les représentants locaux de l’État ont pris le dossier à bras-le-corps, il est urgent que votre gouvernement agisse pour protéger les habitants. Quelles mesures comptez-vous prendre pour identifier puis évacuer les 1 900 tonnes de déchets présents sur le site ? Dans quels délais ?

Comment comptez-vous financer ces évacuations de déchets puis la remise en état du site, alors que le dirigeant d’Axyntis, la maison mère de Synthexim, n’a rempli ni ses obligations légales ni ses obligations financières lors de la liquidation de l’entreprise ? Enfin, réclamerez-vous qu’on vous rende les millions d’euros de subventions publiques accordées au patron d’Axyntis ?

Réponse du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires :

Vous avez rappelé le problème dans ses grandes lignes, à commencer par la liquidation judiciaire, le 31 mai, d’un site classé Seveso seuil haut. Dès le début du mois de juin, les inspecteurs des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) ont constaté que les obligations de mise en sécurité n’avaient pas été remplies.

Une société mère injoignable et insolvable

Le préfet a immédiatement pris des arrêtés, mais la société mère s’est débrouillée pour ne pas être joignable et pour ne pas laisser les fonds nécessaires à la mise en sécurité du site. En accord avec le préfet, j’ai demandé à ce que l’Agence de la transition écologique (Ademe) intervienne au titre de l’urgence impérieuse pour le sécuriser et pour commencer à évacuer les déchets dangereux.

Les 15 tonnes d’amphétamines ont été évacuées. En ce qui concerne les 386 kilogrammes de brome et les 69 tonnes de cyanure, les opérations de déstockage interviendront à compter de la mi-novembre. Le caractère particulier de ces déchets nécessitait en effet l’instauration de protocoles qui viennent d’être validés, ce qui explique le délai d’intervention. Cela laisse les 1 900 tonnes de déchets, qui représentent un volume très important. Elles feront l’objet d’un conditionnement et d’une sécurisation par la suite.

Abordons ensuite le financement. Le préfet a déjà fait le nécessaire pour que l’État récupère 805 000  dans le cadre des garanties financières ; cette somme sera directement fléchée vers l’Ademe. Par ailleurs, j’ai demandé aux services de l’État d’appliquer l’article L. 512-17 du code de l’environnement, qui permet de rechercher la responsabilité de la maison mère, Axyntis. Il est inacceptable qu’elle profite des résultats de l’usine tant qu’elle fonctionne, pour ensuite, au premier problème, s’en séparer en laissant derrière elle des tonnes de déchets dont le traitement est abandonné à l’État. Le code de l’environnement nous donne la possibilité de mettre la maison mère face à ses responsabilités : c’est justement la voie qu’ont choisie les services gouvernementaux et locaux de l’État dans votre circonscription.

AN, 31 oct. 2023, 1re séance.

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