Dommages environnementaux affectant un site Natura 2000

La gestion normale d’un site doit être compatible avec l’esprit et l’objectif des directives Habitats et Oiseaux.

Saisie d’une demande de décision préjudicielle par le Tribunal administratif fédéral, équivalent en Allemagne du Conseil d’État français, la Cour de justice de l’Union européenne est invitée à interpréter deux notions figurant dans la directive 2004/35/CE du 21 avril 2004 sur la responsabilité environnementale en ce qui concerne la prévention et la réparation des dommages environnementaux.

La première est assez complexe : elle résulte de la définition des dommages environnementaux, au sens de cette directive. Ce sont notamment « les dommages causés aux espèces et habitats naturels protégés, à savoir tout dommage qui affecte gravement la constitution ou le maintien d’un état de conservation favorable de tels habitats ou espèces ». L’importance de leurs effets s’évalue par rapport à l’état initial, en tenant compte des critères qui figurent à l’annexe I.

Dans quels cas la gestion normale d’un site Natura 2000 ne provoque pas de dommages significatifs

Cette annexe I détaille ces critères, tout en apportant certaines modulations. Ainsi, peuvent ne pas être qualifiés de dommages significatifs, s’ils n’ont pas d’incidence démontrée sur la santé humaine, « les variations négatives dues à des causes naturelles ou résultant des interventions liées à la gestion normale des sites telle que définie dans les cahiers d’habitat, les documents d’objectif ou pratiquée antérieurement par les propriétaires ou exploitants ».

La demande d’interprétation du Bundesverwaltungsgericht porte sur cette notion de « gestion normale des sites telle que définie dans les cahiers d’habitat, les documents d’objectif ou pratiquée antérieurement par les propriétaires ou exploitants ». En réponse, la CJUE lui fournit deux interprétations pour le prix d’une.

Selon la première, il s’agit d’abord de toute mesure d’administration ou d’organisation susceptible d’avoir une incidence sur les espèces et les habitats naturels protégés se trouvant sur un site Natura 2000, telle qu’elle résulte des documents de gestion adoptés par les États membres sur le fondement des directives Habitats ou Oiseaux. Au besoin, ces documents sont interprétés en référence à toute norme de droit interne transposant ces deux textes.

À défaut, il s’agit de toute mesure d’administration ou d’organisation susceptible d’avoir une incidence sur ces espèces et habitats naturels protégés et compatible avec l’esprit et l’objectif de ces directives.

La gestion d’un site doit être compatible avec les pratiques agricoles

Selon la seconde interprétation, il s’agit de toute mesure d’administration ou d’organisation considérée comme usuelle, généralement reconnue, établie et pratiquée depuis un laps de temps suffisamment long par les propriétaires ou les exploitants jusqu’à la survenance d’un dommage causé par l’effet de cette mesure aux espèces et aux habitats naturels protégés.

L’ensemble de ces mesures doit par ailleurs être compatible avec les objectifs sous-tendant les directives Habitats et Oiseaux ainsi que, notamment, avec les pratiques agricoles couramment admises.

L’autre demande d’interprétation porte sur la notion d’activité professionnelle, définie à l’article 2 de la directive 2004/35/CE comme « toute activité exercée dans le cadre d’une activité économique, d’une affaire ou d’une entreprise, indépendamment de son caractère privé ou public, lucratif ou non lucratif ». La CJUE précise que cette notion d’activité professionnelle vise également les activités exercées dans l’intérêt de la collectivité en vertu d’un transfert légal de mission.

Arrêt de la Cour (première chambre) du 9 juillet 2020 (demande de décision préjudicielle du Bundesverwaltungsgericht — Allemagne) — Naturschutzbund Deutschland — Landesverband Schleswig-Holstein e.V. / Kreis Nordfriesland (Affaire C-297/19) (Renvoi préjudiciel – Environnement – Responsabilité environnementale – Directive 2004/35/CE – Annexe I, troisième alinéa, deuxième tiret – Dommage pouvant ne pas être qualifié de « dommage significatif » – Notion de « gestion normale des sites telle que définie dans les cahiers d’habitat, les documents d’objectif ou pratiquée antérieurement par les propriétaires ou exploitants » – Article 2, point 7 – Notion d’ « activité professionnelle » – Activité exercée dans l’intérêt de la collectivité en vertu d’un transfert légal de mission – Inclusion ou non) (JOUE C 287, 31 août 2020, p. 12).

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