o Écophyto pourrait-il contribuer à désherber une digue en pierre ?

Efficace depuis deux siècles, la digue de Caderousse risque d’être disjointe par les racines des arbustes. Le désherbage chimique est désormais interdit pour les communes, mais on peut envisager une solution sur mesure.

Question de Jean-Baptiste Blanc, sénateur (LR) de Vaucluse :

Dans mon département, la commune de Caderousse est protégée contre les crues du Rhône par ses digues d’enceinte qui datent de 1856 et sont classées au titre des monuments historiques. Cet ouvrage hydraulique constitué de pierres jointées conserve encore aujourd’hui un rôle majeur. Il a résisté aux crues successives, dont celles de 2002 et 2003. Il est d’ailleurs classé comme ouvrage intéressant la sécurité publique par un arrêté préfectoral du 30 janvier 2006.

Aujourd’hui, malgré les travaux ponctuels et l’entretien régulier de ces digues, cette structure se dégrade et se fragilise en raison de la prolifération des herbes et arbustes dans les joints. En effet l’utilisation des produits phytosanitaires pour détruire les végétaux qui se développent entre les pierres est interdite aux personnes publiques, en vertu de la loi du 6 février 2014, dite loi Labbé.

Ces digues risquent à terme de ne plus jouer leur rôle crucial de protection des habitants de Caderousse contre les inondations. Alertée par le maire, la direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf) a indiqué qu’il appartenait au gestionnaire de l’ouvrage, la communauté de communes, de recourir à des modalités alternatives pour désherber les talus par des moyens thermiques, mécaniques ou de biocontrôle.

Nous sommes bien conscients des enjeux écologiques et nous comprenons que l’utilisation de ces produits phytosanitaires doit être raisonnée et limitée dans le temps et dans l’espace. Cependant, aujourd’hui, les produits de biocontrôle proposés ne permettent pas de contenir efficacement les racines des végétaux.

Il existe des dérogations à l’interdiction des produits proscrits, par exemple lorsqu’un danger sanitaire grave vient à mettre en péril la pérennité du patrimoine historique. Ne pensez-vous pas que le risque d’inondation, avec ses enjeux humains, économiques et environnementaux, constitue un danger grave qui pourrait justifier la mise en place d’une telle dérogation ?

Réponse de la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité :

En effet, le maire de Caderousse a demandé à la Draaf une dérogation à l’interdiction d’utiliser des herbicides, afin d’empêcher l’enracinement des arbustes qui pourrait à terme fragiliser les ouvrages et leur faire perdre leur caractère protecteur face aux crues. Cette dérogation a été refusée.

Vous souhaitez donc que soit examinée une des conditions dérogatoires prévues à l’article L. 253-7 du code rural et de la pêche maritime, visant à utiliser des produits phytopharmaceutiques en cas de danger sanitaire grave menaçant la pérennité du patrimoine historique ou biologique et ne pouvant être maîtrisé par un autre moyen, y compris une méthode non chimique.

Envisager le désherbage thermique ou mécanique

Il convient d’examiner la possibilité d’utiliser dans ce cas, comme le font déjà de très nombreux maires, des moyens thermiques ou mécaniques pour éradiquer les mauvaises herbes et les plants d’arbustes. La technique du brûlage se révèle ainsi efficace pour lutter contre le maintien des racines dans les interstices des pierres.

J’ai demandé au directeur de l’eau et de la biodiversité d’examiner les conditions dans lesquelles le plan Écophyto pourrait être sollicité pour soutenir le traitement de tout ou partie des remparts de la ville. Je vous invite à prendre contact avec sa direction pour déterminer les conditions précises d’un tel soutien.

JO Sénat CR, 25 janv. 2023, p. 325.

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