o Éditorial : CACG

Quand un organisme a les honneurs du rapport public annuel de la Cour des comptes, c’est en général de mauvais augure pour ses responsables. Il est très rare qu’une bonne gestion aboutisse à une situation catastrophique. C’est pourtant le cas pour la Compagnie d’aménagement des coteaux de Gascogne : pas de détournement de fonds, pas de dépenses somptuaires, pas de projets mégalomaniaques, et pourtant des comptes qui se dégradent d’année en année.

La chambre régionale des comptes (CRC) de l’Occitanie a bien analysé les causes techniques de cette chute progressive, même si elle est restée muette sur ses causes politiques. Sans rentrer dans le détail, on pourrait résumer ces dernières ainsi : ceux qui avaient le pouvoir de faire évoluer la CACG n’en ont pas eu la volonté. C’est pourquoi cette société d’aménagement régional a conservé son statut de 1959, qui n’est plus adapté à l’évolution de ses activités, avec une concession sous maîtrise d’ouvrage de l’État. Ses deux sœurs qui avaient été créées sous le même statut, la Compagnie d’aménagement du Bas-Rhône et du Languedoc (BRL) et la Société du canal de Provence (SCP), sont depuis longtemps passées à une concession sous maîtrise d’ouvrage régionale. Cela ne les empêche pas de poursuivre leur activité initiale : réaliser et exploiter des aménagements hydrauliques. Et avec un capital conforté, elles ont pu diversifier leurs activités, y compris à l’international.

La CACG n’est pas restée inerte non plus, et elle a suivi la même logique de diversification et d’ouverture à l’international. Elle s’est même engagée dans un plan stratégique en 2017, mais cela a surtout entraîné des investissements considérables à sa charge, sans augmentation notable de ses revenus et avec un endettement excessif. Dans le même temps, elle subit une diminution de ses revenus historiques, car ses ventes d’eau pour l’irrigation régressent. Et ses contraintes environnementales se sont accrues, de sorte qu’elle doit désormais laisser dans les cours d’eau 300 millions de mètres cubes par an, soit 60 % des volumes qu’elle gère. En 1959, quand elle a été fondée, on ne parlait pas de débit réservé…

La CRC recommande donc une régionalisation des concessions de la compagnie, une recapitalisation et une remise à plat des revenus et de leur tarification. Pour l’instant, elle n’a guère soulevé l’enthousiasme. Un des actionnaires historiques, le département de l’Aveyron, en a même profité pour demander à sortir du capital. Les autres interlocuteurs se focalisent surtout sur ces 60 % de volumes d’eau non facturés : outre les débits réservés, ils servent à prévenir les inondations et à alimenter les nappes phréatiques pour atténuer les sécheresses.

Il serait logique de rémunérer la CACG pour ces missions d’utilité publique, mais la Cour des comptes constate qu’il n’existe à ce jour aucune base réglementaire qui le permettrait de manière durable. Il n’y a que des arrêtés préfectoraux à durée de vie limitée, mettant une participation à la charge de tel ou tel bénéficiaire. Le comité de bassin Adour-Garonne travaille certes à pérenniser le financement des soutiens d’étiage, mais cette réflexion est encore loin d’avoir abouti.

René-Martin Simonnet

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