o Éditorial : Grandir

Dernier salon sur l’eau avant le Covid, l’édition 2020 du Carrefour des gestions locales de l’eau (CGLE) avait battu son record de fréquentation. Celle de 2021 n’avait pas pu se tenir au parc des expositions de Rennes comme toutes les précédentes, et elle avait dû se réfugier dans ce monde virtuel et numérique que nous avons hanté depuis deux ans jusqu’à plus soif. Les conférences, qui étaient à l’origine la raison d’être du CGLE, ont plutôt bien surmonté l’épreuve de la caméra. Mais le salon, désormais prépondérant dans cette manifestation, a été déserté par les visiteurs en ligne de 2021. Une mauvaise affaire pour les exposants, qui avaient payé pour louer un stand virtuel, l’aménager et y maintenir du personnel disponible. Une douche froide pour l’organisateur, IdealCO, qui avait naïvement cru pouvoir transposer à l’échelle d’un grand salon des savoir-faire basiques acquis dans quelques petites manifestations en ligne. Et au final, un seul cri des deux côtés : plus jamais ça !

Pour cette année, l’organisateur a donc préféré décaler à la fin juin le Carrefour de l’eau, en visant une période qui avait des chances d’être moins contaminante. Pari gagné de justesse, puisque la France semble bien repartie pour une nouvelle vague. Fut-ce l’effet du beau temps ? D’un désir irrépressible de sociabilité après deux ans de distanciation ? Du besoin d’échanger des idées et des commandes avant un prochain tour de vis ? Toujours est-il que cette édition 2022 semble avoir battu le record de 2020. En nombre d’exposants sur les stands et d’orateurs dans les conférences, c’est certain ; et en nombre de visiteurs, cela me semble bien avoir été le cas, même si je n’ai pas encore reçu le bilan chiffré. En tout cas, il y avait une foule compacte autour de certains stands à l’heure du déjeuner…

Trop compacte, d’ailleurs, et c’est le signe que le CGLE est en train de déborder de son cadre initial. Ce n’est plus une petite réunion bricolée par quelques permanents associatifs, comme à ses débuts, mais un salon respectable, qui sera même cette année le plus grand en France sur l’eau. Et il ne pourra pas continuer à croître sans évoluer, parce qu’il est désormais déséquilibré : trop de visiteurs dans le premier hall du salon et pas assez dans les autres, parce qu’il n’y a qu’une seule entrée ; et trop de conférences simultanées durant la moitié du temps, parce que l’autre moitié est monopolisée par deux séances plénières, d’un intérêt variable, alors que les autres congrès se contentent d’une seule.

L’édition 2023 sera peut-être moins courue, parce qu’elle reviendra à la date habituelle, la dernière semaine de janvier. Mais l’organisateur espère surtout désengorger la manifestation de Rennes en la bouturant à Dijon, moyennant un distinguo homéopathique : il s’agira du Carrefour des gestions durables de l’eau. La différence entre le CGLE de Rennes et le CGDE de Dijon est pour l’instant difficile à concevoir, et on ne la percevra qu’à l’usage. Et rien ne dit que les Bretons iront en Bourgogne, ni que ce nouveau Carrefour fera concurrence à son aîné. Il faudra sans doute que le CGLE accepte de grandir et s’adapte à son nouveau format.

René-Martin Simonnet

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