Éditorial : Stabilisation

On ne va pas faire la fine bouche : l’annonce du gel des effectifs dans les agences de l’eau en 2022 est une très bonne nouvelle pour la gestion de l’eau en France. On n’aura pas la naïveté d’oublier que cette décision vise une année électorale, et que rien n’est promis pour la suite ; mais ce qui est accordé pour un an est toujours bon à prendre. Cette mesure a en outre été annoncée au moment le plus opportun, lors de l’ouverture du congrès mondial de la nature réuni à Marseille, pour redorer un peu le blason de la France dans ce domaine. Elle a été immédiatement relayée par tous les canaux officiels des établissements publics concernés, ce qui a permis de prévenir toute mobilisation sociale qui aurait envisagé de profiter de la tribune offerte par ce congrès.

Pour une fois, ce jour-là, on pouvait sentir un soulagement réel qui parcourait les locaux des organismes concernés. Pourtant, si l’on rentre dans le détail, ce n’est pas le Pérou : en plus de la confirmation des dix postes créés dans le nouveau parc national de forêts, déjà prévus, il y aura dans le budget 2022 dix postes supplémentaires pour les parcs nationaux. Un par établissement en moyenne. Les effectifs de l’Office français de la biodiversité sont gelés à son niveau de 2021, soit 2 638 emplois, alors que Bercy avait prévu – et un peu annoncé – qu’ils baisseraient l’an prochain. En outre, le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres conserve ses 140 agents, et l’établissement public du marais poitevin ses huit postes.

Les agences de l’eau resteront donc à 1 497 personnes, pas une de plus mais, surtout, pas une de moins. Depuis des années, elles maigrissaient en moyenne d’une bonne trentaine d’agents chaque année, au nom de l’ « optimisation » et de la « mutualisation ». Ce rognage permanent se traduisait en réalité par une baisse de leur expertise et de leur efficacité, en particulier dans l’instruction et le suivi des dossiers d’aides. Cette stabilisation sera-t-elle durable ? Dans le communiqué de presse qui l’annonce, le ministère de la transition écologique parle d’ « efforts exceptionnels », ce qui n’a rien de rassurant. En outre, cette mesure s’inscrit dans le renforcement de la politique française de protection de la biodiversité ; elle ne profitera donc pas à la politique de l’eau proprement dite.

René-Martin Simonnet

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