o Études de dangers des conduites forcées

Les conduites forcées sont réparties en quatre classes, en fonction de leur hauteur, de leur diamètre et de leur catégorie. Pour celles des classes A et B, l’étude de dangers doit être renouvelée tous les dix ans.

Depuis six ans, les conduites forcées sont soumises à une étude de dangers, mais cette obligation était très vague, puisque la notion même de conduite forcée n’avait pas été définie. Or, selon le décret n2015-526 du 12 mai 2015 relatif aux règles applicables aux ouvrages construits ou aménagés en vue de prévenir les inondations et aux règles de sûreté des ouvrages hydrauliques, les premières études de dangers pour les conduites forcées doivent être remises avant 2024. Il était donc temps d’apporter les précisions nécessaires.

C’est le but du présent décret en Conseil d’État et de son arrêté d’application ; mais on y trouve aussi des dispositions plus générales, car ce n’est pas tous les jours qu’on peut retoucher une réglementation. Le décret commence par modifier le code de l’environnement :

Art. R. 214-112 (modifié) : La hauteur d’un barrage de retenue n’est plus définie comme la plus grande hauteur mesurée verticalement entre le sommet de l’ouvrage et le terrain naturel à l’aplomb de ce sommet, mais comme la plus grande différence de cote entre le sommet de la crête de l’ouvrage et le terrain naturel au niveau du pied de l’ouvrage.

Pour le volume retenu dans un canal, on ne prend plus seulement en compte les digues de canaux, mais tous les remblais latéraux à un bief, et le volume considéré est alors celui du bief situé entre deux écluses ou deux ouvrages vannés.

Quatre classes de conduites forcées

Art. R. 214-112-1 (nouveau) : Les conduites forcées sont classées dans quatre classes, de A à D, en fonction de leur potentiel de danger apprécié au regard de leurs dimensions et de leurs caractéristiques techniques. Cela concerne les conduites connexes aux installations mentionnées à l’article L. 214-2 du code de l’environnement et utilisant l’énergie hydraulique, et celles qui font partie d’une installation hydraulique concédée ou autorisée en application du livre V du code de l’énergie. Sont considérés comme des constituants d’une conduite forcée les équipements indispensables à son fonctionnement, y compris l’éventuelle galerie d’alimentation ou galerie d’amenée, et toutes les ramifications de la conduite forcée.

Art. R. 214-115 (modifié) : Les conduites forcées des classes A, B et C sont soumises à une étude de dangers. Celles de la classe D y sont soumises sur décision du préfet lorsque leur potentiel de danger est accru du fait des caractéristiques de leur environnement proche.

Art. R. 214-116 (modifié) : Pour la construction ou la reconstruction d’un barrage, l’étude de dangers démontre la maîtrise des risques pour la sécurité publique au cours de chacune des phases du chantier. Dans tous les cas, il faut transmettre au préfet, trente-six mois avant l’étude, et non plus six mois, la description de l’examen exhaustif de l’état des ouvrages, réalisé conformément à une procédure adaptée à la situation des ouvrages et de la retenue ; pour la première étude de dangers, cette description de la procédure est transmise avec l’étude elle-même. Le délai antérieur de six mois s’appliquera encore aux études de dangers exigibles avant le 1er janvier 2026 et concernant les barrages et les ouvrages assimilés.

Étude de dangers simplifiée

Une étude de dangers simplifiée peut être établie pour les conduites forcées des classes C ou D, s’il apparaît au responsable de l’ouvrage que les risques qu’elles comportent pour les personnes et les biens situés dans son voisinage en cas d’accident sont faibles. Il doit toutefois réaliser une étude de dangers complète si cette étude simplifiée ne permet pas de démontrer que la conduite forcée présente des garanties de sécurité suffisantes.

Art. R. 214-117 (modifié) : L’échéance initiale du 31 décembre 2023 pour les études de dangers des conduites forcées est supprimée. La périodicité de renouvellement de l’étude de dangers d’une conduite forcée reste fixée à dix ans pour les conduites forcées des classes A ou B. Elle passe à vingt ans pour celles des classes C ou D.

Pour une conduite forcée de classe C ou D ayant été soumise à une étude de dangers simplifiée, le responsable de l’ouvrage porte sans délai à la connaissance du préfet tout changement notable de nature à remettre en cause le bénéfice de cette étude de dangers simplifiée, et il lui transmet dans un délai de deux ans une étude de dangers normale.

Aménagement hydraulique contre les crues

Art. R. 214-122 (modifié) : À compter du 1er juillet 2022, le gestionnaire d’un aménagement hydraulique visant à réduire l’exposition d’un territoire au risque d’inondation ou de submersion marine établit ou fait établir un document décrivant l’organisation mise en place pour gérer cet aménagement, son entretien, sa surveillance et les moyens d’information et d’alerte de la survenance de crues et de tempêtes. De même, il porte ou fait porter dans un registre les principaux renseignements relatifs aux travaux, à l’exploitation, à la surveillance, à l’entretien de l’aménagement, aux conditions météorologiques et hydrologiques exceptionnelles et à l’environnement de l’aménagement.

Le décret modifie ensuite l’article R. 521-45 du code de l’énergie : le rapport de surveillance d’une conduite forcée d’une concession hydroélectrique est établi tous les dix ans ; il en est de même du rapport d’auscultation si la conduite forcée est dotée d’un tel dispositif. Ces documents sont transmis au préfet dans le mois qui suit leur réalisation.

À titre transitoire, le décret prévoit enfin des échéances spécifiques pour les conduites forcées relevant du code de l’environnement qui existaient ou dont la demande d’autorisation avait été déposée au plus tard le 31 décembre 2021 : si elles n’ont pas encore fait l’objet d’une étude de dangers, le responsable de l’ouvrage transmet ce document au préfet avant 2026 pour les conduites forcées de la classe A, avant 2031 pour celles de la classe B et avant 2033 pour celles de la classe C.

Pour celles de la classe D qui sont soumises à une étude de dangers, cette étude est transmise à l’échéance fixée par le préfet, qui ne peut être antérieure ni au 31 décembre 2032 ni à un délai d’au moins vingt-quatre mois à compter de l’arrêté prescrivant sa réalisation.

Lorsque les conduites forcées relevant du régime de la concession, en application du livre V du code de l’énergie, n’ont pas encore fait l’objet d’un rapport de surveillance ou, lorsqu’elles sont dotées d’un dispositif d’auscultation, d’un rapport d’auscultation, ces documents sont transmis au préfet au plus tard le 31 décembre 2023 si la conduite forcée est de la classe A ou B, et le 31 décembre 2025 si elle est de la classe C ou D.

Le décret prévoit plusieurs arrêté ministériels d’application, mais celui qui a été publié le même jour ne porte que sur les articles R. 214-112-1 et R. 214-115 du code de l’environnement. Il y en aura donc d’autres.

Ce qui constitue une conduite forcée

Celui-ci commence par détailler les constituants d’une conduite forcée. Pour un ouvrage dont la fonction est l’alimentation d’une turbine, la ou les extrémité amont de la conduite forcée incluent la ou les prises d’eau lorsque l’écoulement y est en charge ; sinon, elle débute au point où l’eau ne s’écoule plus à surface libre à la cote d’exploitation normale. La ou les extrémités aval sont les points de restitution de l’eau par un écoulement à surface libre, soit directement au milieu naturel ou dans une retenue artificielle, soit par le biais d’un canal de fuite.

Entre ces extrémités, la conduite forcée comprend la conduite sous pression et, s’ils existent, les tronçons amont de la galerie d’amenée et ses fenêtre d’accès lorsque l’écoulement y est en charge, la cheminée d’équilibre, le dispositif d’admission d’air, les trous d’homme, le ou les rameaux de conduite de décharge, la ou les conduites de décharge distinctes de la conduite forcée, les autres éléments indispensables à son fonctionnement normal et à sa mise en sécurité, comme les appuis, les vannages, les piquages, les équipements nécessaires à la fourniture des utilités et le contrôle commande associé, et enfin la bâche de turbine.

À l’exception de cette bâche, les mêmes éléments se retrouvent en tant que constituants d’une conduite forcée dont la fonction est de siphonner de l’eau entre deux bassins versants. Et pour une conduite forcée dont la fonction est d’assurer un pompage, on retrouve également tous les mêmes éléments, si ce n’est que la bâche de pompe remplace la bâche de turbine et qu’il n’est pas question de conduite de décharge. Si une conduite forcée sert à plusieurs de ces usages, on cumule tous les constituants correspondants.

Le potentiel de danger détermine la classe

Les quatre classes de conduites forcées sont déterminées à partir de leur potentiel de danger apprécié au regard de leurs caractéristiques techniques et de la valeur maximale du produit De constaté le long du linéaire de la conduite forcée.

En chaque point de la conduite forcée, le paramètre H correspond à la hauteur de charge hydraulique exprimée en mètres de colonne d’eau ; le paramètre De correspond au diamètre équivalent exprimé en mètres, à savoir le diamètre intérieur de la conduite cylindrique fictive qui aurait la même section d’écoulement que la conduite réelle ou, le cas échéant, que les différentes ramifications parallèles de la conduite réelle. Le produit De pourrait donc être exprimé en mètres carrés.

L’arrêté détaille très précisément les règles de détermination de ces deux paramètres, notamment en présence de ramifications. Les conduites forcées dont la valeur maximale du paramètre H ne dépasse pas 30 m de colonne d’eau ne sont pas concernées par la présente réglementation.

Pour les conduites forcées dont la conception est exclusivement du type « puits blindé », le cas échéant précédé d’un tronçon de galerie d’amenée, la classe A regroupe celles dont le produit De dépasse 1 400 ; la classe B, celles dont le produit De est compris entre plus de 1 000 et 1 400 ; la classe C, celles dont le produit De est compris entre plus de 500 et 1 000 ; et la classe D, celles dont le produit De est compris entre plus de 350 et 500.

Pour les autres conduites forcées, la classe A est la même ; la classe B va de plus de 700 à 1 400 ; la classe C va de plus de 350 à 700 ; et la classe D va de plus de 250 à 350. Toutefois, si la conduite forcée est ramifiée, on tient compte des caractéristiques des tronçons non ramifiés et de celles des ramifications, et c’est alors la classe la plus élevée qui s’applique, avec une classification légèrement différente pour les tronçons constitués de ramifications parallèles.

Classe D : la proximité accroît le danger

Enfin, pour évaluer si le potentiel de danger d’une conduite forcée de la classe D peut être aggravé, au sens de l’article R. 214-115 du code de l’environnement, en raison des caractéristiques de son environnement proche, on prend notamment en compte l’existence d’au moins une autre conduite forcée de la classe D qui lui est voisine et dont le niveau de pression est inférieur ou équivalent à celui de la conduite étudiée. L’aggravation du potentiel de danger est réputée significative lorsque la conduite étudiée est établie parallèlement à sa voisine, à moins de 20 mètres entre nu des conduites, et sur une longueur d’au moins 50 mètres.

Décret no 2021-1902 du 29 décembre 2021 relatif à la sécurité des ouvrages hydrauliques autorisés, déclarés ou concédés en application du code de l’environnement ou du code de l’énergie

Arrêté du 29 décembre 2021 précisant les classes des conduites forcées visées à l’article R. 214-112-1 du code de l’environnement (JO 31 déc. 2021, textes nos 4 et 30).

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