Évaluation d’une politique publique locale

Une chambre régionale des comptes peut fournir à la demande une évaluation objective d’une politique publique ou d’un investissement d’une région, d’un département ou d’une métropole, par exemple après un changement de majorité.

Dans la loi 3DS, l’article 229 a ajouté un chapitre au code des juridictions financières, dont en particulier un article L. 235-1 qui permet au président d’une région, d’un département ou d’une métropole de saisir la chambre régionale des comptes (CRC) dont il dépend, une fois tous les six ans, pour lui demander d’évaluer une politique publique relevant de la compétence de cette région, de ce département ou de cette métropole. Pour la Corse, la Guyane et la Martinique, il s’agit du président du conseil exécutif.

Le présent décret en Conseil d’État applique cet article. Il commence par préciser un point qui a été omis par le législateur : la CRC peut évaluer de sa propre initiative une politique publique relevant des collectivités territoriales et organismes soumis à sa compétence de contrôle des comptes et de la gestion. Le président de la CRC en informe l’organe exécutif et, le cas échéant, les dirigeants des organismes concernés. Il applique la même procédure que lorsqu’il est saisi par un des présidents mentionnés ci-dessus.

Saisine de la chambre régionale des comptes

Quand un de ces présidents saisit la CRC, il précise le champ de la politique publique concernée et la période sur laquelle elle doit être évaluée (NDLR : par exemple le mandat de son prédécesseur). Il joint à sa saisine une note de présentation de cette politique précisant les publics concernés, les résultats ou effets attendus et les volumes financiers, une liste des données et traitements relatifs à cette politique et disponibles sous format numérique, et l’ensemble des délibérations et des rapports relatifs à cette politique. Le président de la CRC lui indique le délai proposé par la chambre pour réaliser l’évaluation. Il doit lui notifier le rapport définitif d’évaluation un an au maximum après la transmission de toutes les pièces ci-dessus.

Dès réception de la réponse de l’auteur de la saisine ou, à défaut de réponse, au bout de quinze jours, il l’informe du délai retenu et de la date d’engagement de l’évaluation ; il en informe aussi le représentant de l’État dans la région ou le département et, le cas échéant, les dirigeants des organismes concernés par cette politique publique (NDLR : une fois qu’il a saisi la CRC, le président de la collectivité ne peut plus arrêter l’évaluation).

En cas d’évaluation réalisée par la CRC de sa propre initiative, le rapport définitif est notifié au plus tard un an après la date à laquelle le président de la chambre a annoncé le lancement de cette évaluation au président de l’organe exécutif ou au dirigeant de l’organisme concerné.

Cohérence et efficacité de la politique évaluée

Dans son rapport d’évaluation, la CRC apprécie notamment les résultats et les impacts de la politique publique ainsi que les facteurs qui les expliquent. L’appréciation porte sur la cohérence et l’efficacité de la politique concernée. Le président de la formation compétente peut désigner un contre-rapporteur.

Il peut inviter toute personne dont la compétence ou les connaissances seraient de nature à éclairer utilement la formation compétente à produire des observations écrites ou orales. Le cas échéant, le président de la chambre informe l’auteur de la saisine de ces consultations. Les personnes que la CRC décide d’entendre sont convoquées par le président de la chambre. Cette convocation précise les points sur lesquels la chambre les entendra et est accompagnée, s’il y a lieu, de tout document que le président de la chambre juge utile en vue de l’audition par la formation compétente. Cette audition n’est pas publique.

Un registre des auditions est tenu par le greffe de la chambre. Il mentionne la liste des personnes entendues et la date des auditions. À la demande du président, il peut être pris note du déroulement de l’audition et des déclarations des personnes entendues.

La formation délibérant le rapport d’évaluation d’une politique publique peut associer des personnalités extérieures aux juridictions financières. Ces personnalités extérieures sont choisies par le président de la chambre, après avis du procureur financier. Elles prennent part au débat mais ne participent pas au délibéré.

Une fois le rapport prêt, il peut ou doit être soumis au procureur financier dans les cas prévus à l’article R. 212-16 du code des juridictions financières, notamment s’il porte sur des faits susceptibles de justifier une transmission au procureur de la République ou une saisine de la Cour de discipline budgétaire et financière.

Si le ministère public n’a pas été saisi ou s’il a donné son accord, le président de la chambre inscrit l’examen du rapport à l’ordre du jour de la formation délibérante compétente. Celle-ci délibère à huis clos sur les propositions du rapporteur et, le cas échéant, sur l’avis du contre-rapporteur et sur les conclusions du ministère public.

Un mois pour répondre au rapport provisoire

Le président de la CRC adresse le rapport provisoire d’évaluation au président qui l’a saisi. Il adresse également tout ou partie de ce rapport à tout organisme ou personne concernés par l’évaluation de la politique publique. Ces destinataires ont au moins un mois pour apporter une réponse écrite, et ils peuvent aussi être entendus à huis clos par la chambre ou compléter ou préciser ces réponses écrites.

Cela fait, ou en l’absence de réponse écrite, la CRC peut arrêter son rapport définitif d’évaluation, que son président communique au représentant de l’État dans la région ou le département, et qu’il notifie au président auteur de la saisine. Ce dernier doit lui indiquer en réponse la date de la plus prochaine réunion de l’assemblée délibérante ou de l’organe collégial de décision, puis lui communiquer copie de son ordre du jour : le rapport définitif et les réponses au rapport provisoire doivent en effet donner lieu à débat de l’assemblée délibérante durant cette réunion. Le rapport est rendu public ensuite, ou au plus tard dans les deux mois qui suivent sa réception par le président auteur de la saisine.

Demande d’avis sur un projet d’investissement

Par ailleurs, un président de conseil régional, de conseil départemental, du conseil d’une métropole, du conseil d’une communauté urbaine ou du conseil exécutif de la Corse, de la Martinique ou de la Guyane peut saisir pour avis la CRC sur les conséquences de tout projet d’investissement, dès lors que son montant prévisionnel total atteint au moins 50 M ou 10 % des recettes réelles de fonctionnement du précédent exercice de sa collectivité ou de son groupement de communes. Il joint à cette saisine la proposition éventuelle de l’organe délibérant et tout document et renseignement utiles à son examen, notamment le montant prévisionnel total des dépenses d’investissement liées au projet et celui des dépenses supplémentaires de fonctionnement qu’il induit.

La CRC dispose de six mois pour rendre un avis motivé, dans lequel elle examine l’économie générale du projet et estime son incidence sur la situation financière de la collectivité ou du groupement concerné. Elle notifie cet avis au président auteur de la saisine et au représentant de l’État dans la région ou le département. L’avis donne lieu à débat de l’assemblée délibérante lors de sa réunion suivante, et il est publié par la CRC après ce débat, ou au plus tard deux mois après la notification au président.

Décret no 2022-1549 du 8 décembre 2022 relatif à l’évaluation des politiques publiques territoriales par les chambres régionales des comptes (JO 11 déc. 2022, texte n1).

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