o Les problèmes d’eau à Mayotte seront résolus en 2032

En plus du changement climatique, le département doit affronter une démographie galopante et une immigration massive, et le gestionnaire public de l’eau semble incapable de faire face.

Question d’Estelle Youssouffa, députée (Liot) de Mayotte :

Mayotte connaît des coupures d’eau depuis plusieurs années. Chaque foyer mahorais subit les coupures institutionnalisées, avec des robinets à sec deux jours par semaine, de 17 heures à 7 heures du matin, sans compter les coupures intempestives sans alerte, qui laissent les habitants sans eau courante parfois trois jours d’affilée. Je vous laisse imaginer le cauchemar logistique pour les malades, les enfants, les vieux, la cuisine et l’hygiène, alors que le prix des packs d’eau atteint 9 à 12 . Cette situation aurait-elle été tolérée sur le territoire hexagonal ?

Le plan d’urgence eau Mayotte de 2017, piloté par le ministère des outre-mers, était censé répondre à la crise et surtout apporter des solutions pérennes. C’est un échec : le rehaussement d’un mètre de la retenue collinaire de Combani a été livré en retard, pour n’ajouter que 250 000 m3 de stockage d’eau brute, soit sept jours de consommation. Et je ne parle même pas de la progression démographique, qui fait augmenter nos besoins à Mayotte.

Malgré les millions investis, l’usine de dessalement de Petite-Terre ne produit toujours pas à hauteur des promesses et des besoins. La sixième campagne de prospection de forages ne sera mise en route que sur la période 2024-2026. Certes, 416 M ont été mis sur la table avec le nouveau contrat de progrès 2022-2026 conclu entre l’État et Les Eaux de Mayotte, qui est le seul syndicat compétent en matière d’eau potable.

Mais c’est la troisième fois que l’État passe un contrat sans aucun résultat avec une institution notoirement défaillante, actuellement sous le coup d’une enquête du parquet national financier. Nous ne pouvons attendre que l’on nettoie les écuries d’Augias ni que vous vous mettiez d’accord pour enfin nous fournir de l’eau potable tous les jours et entamer les travaux nécessaires pour la deuxième usine de dessalement et la troisième retenue collinaire.

J’ai survolé la retenue collinaire de Dzoumogné, qui doit alimenter le nord de la Grande-Terre. Elle est quasiment vide, alors que nous sommes en pleine saison des pluies : elle devrait être à son maximum et servir de réserve. La situation est gravissime. Comment allons-nous pouvoir tenir à Mayotte ? Nous allons vers de très longs mois sans eau courante. Comment allez-vous répondre à l’urgence de la crise de l’eau qui perdure ? Quelles dispositions entendez-vous prendre pour les trois années à venir, en attendant les grandes infrastructures annoncées pour 2026, qui paraissent déjà bien en retard ?

Réponse de la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité :

Afin de répondre aux besoins croissants et d’accompagner le syndicat Les Eaux de Mayotte dans la réalisation de ses missions, l’État a mis en place de nombreuses actions en matière de financement, d’investissement et de soutien à l’ingénierie. Dans le cadre du plan Eau DOM, 64,2 M ont été mobilisés depuis 2016 et 85 M de prêts ont été consentis. Par ailleurs, 10,1 M du plan de relance ont été fléchés vers le département, dont 3,2 M pour l’eau potable.

Cela a notamment permis de lancer la création de l’usine de dessalement à Grande-Terre. Dans un contexte de changement climatique, et compte tenu de la dépendance du territoire à la pluviométrie que vous avez décrite, la sortie durable de la crise repose nécessairement sur un accroissement de la part des usines de dessalement dans les moyens de production d’eau potable. L’usine de Grande-Terre, d’une capacité de 16 000 m3/j, alimentera à la fois le nord et le sud de l’île ; sa capacité sera ensuite portée à 48 000 m3/j d’ici à 2032.

S’agissant de l’usine de dessalement de Petite-Terre, des travaux sont en cours afin d’augmenter au plus tôt sa capacité de production de 2 000 m3/j. Enfin, concernant la troisième retenue collinaire, nous faisons tout, aux côtés du syndicat, pour qu’elle soit mise en service en 2032, afin d’augmenter la capacité de production de 5 000 m3/j.

J’en viens au contrat de progrès et à ses 411 M, au titre duquel l’État accompagne fortement Les Eaux de Mayotte pour que ses capacités d’exécution progressent et que le calendrier soit strictement tenu. Après l’installation d’une assistance technique composée de cinq postes d’ingénieur et de chargé d’opérations, quatre postes supplémentaires ont été créés et seront bientôt pourvus. Les forages prévus dans le contrat permettront par ailleurs d’augmenter la capacité du réseau à court terme.

Réplique d’Estelle Youssouffa :

Les solutions que vous présentez reposent toutes sur Les Eaux de Mayotte, un syndicat qui s’avère être particulièrement défaillant. La situation de sécheresse est déjà notre quotidien. Aussi, je vous demande de réfléchir à un financement de citernes pour les maisons individuelles, mais aussi à un plafonnement du prix de l’eau que l’on est obligé d’acheter dans les supermarchés. C’est un bien de base qui atteint des prix records à Mayotte.

AN, 7 mars 2023, 1re séance.

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