Pour réguler les cormorans sur les eaux libres, il faudra en démontrer la nécessité

Les tirs ne pourront être autorisés que sur le fondement d’études scientifiques.

Question de Bruno Sido, sénateur (LR) de la Haute-Marne :

Jusqu’à présent, il était possible de réguler les cormorans dans certains départements sur les eaux libres. Dans le mien par exemple, il était possible d’en abattre 290 par an. Car la protection de cette espèce lui a permis d’accroître ses effectifs. Selon un comptage de vos services, les effectifs des cormorans en bord de lac et de rivière ont augmenté de 16 % en trois ans. Or chaque spécimen prélève environ une livre de poisson par jour, ce qui affecte les écosystèmes aquatiques et menace la préservation de certaines espèces rares de poissons.

Mais les arrêtés préfectoraux qui permettent cette régulation sont de plus en plus contestés par des associations de protection de l’environnement et annulés ou suspendus par la justice. C’est pourquoi vous avez désormais renoncé à réguler le cormoran sur les eaux libres ; mais votre décision ne va pas dans le sens de la préservation de la biodiversité. Comment comptez-vous donc désormais protéger les espèces piscicoles contre un prédateur marin de plus en plus envahissant à l’intérieur des terres ?

Réponse de la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, au nom du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires :

La régulation des cormorans est régie par un arrêté ministériel du 26 novembre 2010, qui fixe les conditions et limites dans lesquelles les dérogations à l’interdiction de destruction peuvent être accordées. Il est complété par un arrêté ministériel pris tous les trois ans sur proposition du groupe national cormorans, qui fixe les quotas départementaux dans les limites desquels les dérogations peuvent être accordées.

Ce sont ensuite des arrêtés préfectoraux qui déclinent cette réglementation nationale au cas par cas (NDLR : mais ils devraient être fondés sur des nécessités locales dûment constatées, et non sur le seul quota triennal, qui n’est qu’un plafond).

Vingt arrêtés préfectoraux annulés ou menacés d’annulation

Concernant la régulation dans les eaux libres, ces arrêtés préfectoraux sont de plus en plus contestés, et tous les recours contentieux de ces dernières années ont été perdus par l’État : quinze arrêtés ont été annulés et le sort de cinq autres est encore incertain. Au regard de la difficulté à justifier l’octroi de dérogations sur les cours d’eau et plans d’eau, le nouvel arrêté triennal fixe toujours des plafonds pour les piscicultures, mais il ne prévoit plus aucune dérogation pour les eaux libres. (voir Journ’eau no 1305)

Toutefois, si des études robustes produites localement démontraient l’impact du grand cormoran sur l’état de conservation des espèces de poisson menacées, cet arrêté ministériel pourrait être complété, au cours même de la période triennale, afin de mettre en place des plafonds sur les cours d’eau et plans d’eau concernés. Quatre départements ont été identifiés, dans lesquels nous engageons déjà les travaux pour documenter les impacts sur la faune aquatique.

Sénat, 29 nov. 2022.

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