Prélèvements et rejets de l’installation nucléaire secrète de Pierrelatte

Le caractère secret de l’installation n’a que peu d’impact sur les règles à appliquer en matière d’eau.

Outre diverses installations à caractère industriel, le site nucléaire du Tricastin comporte une installation nucléaire de base secrète, exploitée par Orano Cycle à Pierrelatte (Drôme). Il ne faut pas la confondre avec l’ancienne usine militaire de Pierrelatte, qui produisait également des matières fissiles pour l’armée, mais qui est désormais démantelée.

Le présent arrêté modifie les règles encadrant les prélèvements d’eau et les rejets d’effluents de cette INBS. Nonobstant ses dispositions, les rejets doivent toujours être compatibles avec les objectifs de qualité et de quantité définissant l’état écologique et chimique des milieux aquatiques fixés par le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux du bassin Rhône-Méditerranée.

L’exploitant dispose de deux laboratoires distincts, l’un pour la mesure de la radioactivité dans l’environnement, l’autre pour le contrôle des effluents ; il peut s’agir de laboratoires communs aux installations nucléaires du site du Tricastin. Il peut sous-traiter certaines analyses à des laboratoires extérieurs, après information du délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les installations et activités intéressant la défense (DSND) et de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

Anticiper les pluies diluviennes

Il dispose de moyens mobiles redondants lui permettant de réaliser, en toutes circonstances, des prélèvements et des mesures à l’intérieur et à l’extérieur de l’INBS. Il dispose d’un personnel compétent qualifié en radio-analyses et en analyses chimiques. Il dispose de moyens d’information lui permettant d’anticiper les épisodes météorologiques susceptibles d’affecter la maîtrise des rejets d’effluents dans les installations réceptrices ou les milieux récepteurs.

Il tient à jour un registre des quantités d’eau prélevées mensuellement par l’INBS pour les besoins du site du Tricastin. Pour les rejets radioactifs, il tient en permanence à jour, pour chaque type d’effluent, un registre de maintenance et d’étalonnage des dispositifs de mesure en continu ou non des rejets et des appareils de mesure des laboratoires d’analyse, ainsi qu’un registre des états mensuels précisant notamment, pour chaque rejet, la durée, le volume et l’activité du rejet, la composition et les activités ou les quantités volumiques mesurées, et tous les incidents de fonctionnement.

Pour les substances chimiques présentes dans les effluents liquides, il tient à jour un registre récapitulant les analyses et les mesures effectuées. Il tient enfin à jour un registre des résultats des mesures dans l’environnement. Tous ces registres, éventuellement informatisés, sont notamment tenus à la disposition des agents assermentés chargés de la police de l’eau.

Les agents des différents services de contrôle peuvent à tout moment faire réaliser des prélèvements, des mesures et des analyses, aux frais de l’exploitant. Le DSND peut prescrire des mesures complémentaires à celles qui sont prévues par le présent texte.

Toutes les dispositions doivent être prises lors de la conception, de la construction, de l’entretien et de l’exploitation de l’INBS pour limiter la consommation d’eau, en particulier par l’utilisation des meilleures technologies disponibles à un coût économiquement acceptable. La réfrigération en circuit ouvert est interdite, sauf pour les circuits existants.

L’exploitant comptabilise les volumes d’eau prélevés. Il est tenu de se conformer aux règlements, existants ou à venir, relatifs à la police, au mode de distribution et au partage des eaux. Les agents chargés du contrôle ont constamment accès aux installations de prélèvement et de rejet d’eau.

Protéger les installations contre les crues du Rhône

Les ouvrages de prélèvement ne doivent pas perturber la libre circulation des eaux. L’exploitant s’engage à supporter les frais de toute modification de ses installations résultant de l’exécution de travaux d’entretien ou d’aménagement de la voie navigable. En temps de crue du Rhône ou de ses affluents, il doit prendre toute mesure utile pour éviter des dégâts à ses installations. L’autorisation de prélèvement peut être révoquée à la demande des agents de la police de l’eau en cas d’inexécution du présent arrêté. L’installation de prélèvement d’eau devra alors être rendue inutilisable.

L’exploitant est responsable des accidents causés aux tiers et aux ouvrages publics du fait de ses installations. L’occupation du domaine public fait l’objet d’une convention avec Voies navigables de France. La cessation d’utilisation ou la remise en service d’un prélèvement, en particulier d’un forage dans la nappe alluviale, fait l’objet d’une autorisation du DSND.

Les prélèvements sont effectués dans le canal de Donzère-Mondragon pour l’alimentation en eau brute industrielle des installations du site du Tricastin, dans le contre-canal en rive droite du Rhône pour l’alimentation de secours de ces mêmes installations, le décolmatage des siphons et l’alimentation de la station de traitement des effluents chimiques de l’INBS, et dans la nappe alluviale, notamment pour l’alimentation en secours du réseau de défense contre l’incendie.

La présente autorisation fixe des volumes annuels et des débits de prélèvement à ne pas dépasser. L’INBS est alimentée en eau potable par le réseau public de la ville de Bollène (Vaucluse), dans la limite de 200 000 m3 par an. En outre, Orano Cycle fournit en eau industrielle certaines installations du site du Tricastin, dans le cadre de conventions.

Toutes les dispositions sont prises au niveau des forages pour prévenir toute introduction de pollution depuis la surface. En particulier, chaque puits de prélèvement dans la nappe alluviale est équipé d’un clapet anti-retour ou d’un dispositif équivalent. En cas de cessation d’utilisation d’un forage, l’exploitant prend les mesures appropriées pour son obturation ou son comblement, afin d’éviter la pollution de la nappe alluviale.

Maintenir l’état des cours d’eau

Les ouvrages de prélèvement et de raccordement d’eau sont protégés des agressions externes et leur accès est interdit à toute personne non nommément désignée par l’exploitant. Les ouvrages de raccordement aux réseaux publics de distribution d’eau potable sont conçus, construits, exploités et démantelés de façon à limiter la consommation d’eau, à en privilégier le recyclage et à éviter et réduire toute pollution de la ressource en eau. L’exploitant doit entretenir et maintenir en bon état de fonctionnement les moyens de mesure, afin de maintenir l’état des cours d’eau et de garantir que les quantités d’eau prélevées restent conformes aux conditions de l’autorisation.

Il entretient en bon état les terrains occupés et les ouvrages et installations de prélèvement d’eau. La mise hors service d’un ouvrage ou d’une installation de prélèvement d’eau sur prescription des autorités est faite à ses frais. Lorsque des travaux de réfection sont nécessaires, il en informe au préalable le service chargé de la police de l’eau.

Toutes les dispositions doivent être prises lors de la conception, de la construction, de l’entretien et de l’exploitation des installations de l’INBS, en particulier par l’utilisation des meilleures technologies disponibles à un coût économiquement acceptable, pour limiter l’impact des rejets d’effluents radioactifs et chimiques sur l’environnement et les populations. Ce principe s’applique également aux dispositifs destinés à mesurer le niveau des rejets en vue d’évaluer leur impact sur l’environnement.

Traiter les effluents liquides et en limiter les rejets

L’exploitant doit réaliser les vérifications et mesures nécessaires au bon fonctionnement des installations. Les dispositifs de traitement et d’entreposage des effluents sont conçus, exploités, entretenus et contrôlés de manière à réduire les durées d’indisponibilité pendant lesquelles ils ne peuvent assurer pleinement leur fonction. Les installations de rejet et de transfert sont conçues, exploitées et entretenues de manière à limiter les rejets d’effluents liquides.

Ces effluents sont collectés à la source, canalisés et, si besoin, traités, afin que les rejets correspondants soient maintenus à un niveau aussi faible que raisonnablement possible. Les installations de traitement nécessaires au respect des valeurs limites de rejets prescrites sont conçues de façon à faire face aux variations des caractéristiques des effluents bruts, y compris en période de démarrage ou d’arrêt des installations.

L’exploitant établit des plans de tous les réseaux de rejet, qui indiquent la nature des installations raccordées à ces réseaux. Ces plans sont tenus à la disposition des agents des autorités de contrôle, et des services d’intervention en cas d’incident ou d’accident. Chaque circuit de rejet d’effluents comporte au moins un point de prélèvement, implanté de telle sorte qu’il permet de réaliser des mesures représentatives de l’effluent rejeté.

Le programme de surveillance des rejets, des eaux souterraines et du milieu récepteur est tenu à la disposition du DSND.

Toute modification apportée par l’exploitant à un ouvrage ou une installation de l’INBS, à son mode d’utilisation, à la réalisation de travaux, à l’aménagement en résultant, à l’exercice de son activité ou à son voisinage et de nature à entraîner des conséquences sur les rejets d’effluents doit être portée, avant sa réalisation, à la connaissance du DSND, qui statue sur la procédure réglementaire à adopter. S’il estime que la modification est de nature à entraîner des dangers ou des inconvénients supplémentaires notables pour l’environnement, il peut exiger le dépôt d’une nouvelle demande d’autorisation.

Les rejets d’effluents liquides, radioactifs ou non, ne sont autorisés que dans les limites et les conditions techniques fixées par le présent arrêté. Les rejets d’effluents liquides non contrôlés sont interdits. Les différentes catégories d’effluents doivent être collectées le plus en amont possible et faire l’objet, en tant que de besoin, d’un traitement spécifique. Les installations d’entreposage et de traitement disposent d’équipements permettant de collecter, d’entreposer et de traiter séparément, suivant leur nature et leur origine, la totalité des effluents destinés à être rejetés dans l’environnement.

Transfert des effluents entre plusieurs installations du site

Des conventions sont conclues afin de préciser la nature, la quantité ainsi que les conditions de transfert des effluents liquides réalisés entre l’INBS et les autres installations du site nucléaire du Tricastin. Elles sont transmises pour information au DSND et à l’ASN. L’exploitant transmet annuellement au DSND, pour approbation, les prévisions de transfert des effluents externes à l’INBS, en précisant les volumes et les catégories concernées. Il soumet également à son approbation toute évolution significative de ces prévisions.

Le présent arrêté précise quelles installations traitent quels effluents, fixe des limites pour les rejets dans le milieu naturel, en matière de radioactivité et de paramètres physico-chimiques, et détaille dans quels exutoires les effluents et les eaux pluviales doivent être rejetés. Les installations à l’origine des effluents liquides doivent être conçues, exploitées et entretenues de façon à maintenir l’activité des substances radioactives et la quantité de substances chimiques rejetées aussi basses que raisonnablement possible. Il est interdit d’établir des liaisons directes entre les réseaux de collecte des effluents devant subir un traitement et le milieu récepteur ou les réseaux d’assainissement extérieurs à l’INBS.

L’arrêté précise aussi les modalités de surveillance des rejets, en particulier pour les effluents radioactifs. Il fixe des règles de surveillance de l’environnement, en particulier des milieux récepteurs, pour la radioactivité, les paramètres physico-chimiques et les paramètres biologiques. Il détaille enfin les modalités d’information des autorités administratives et du public, en tenant compte du caractère secret des activités exercées dans l’installation.

Arrêté du 22 mars 2021 autorisant la société Orano Cycle à poursuivre les rejets d’effluents liquides et gazeux, les prélèvements et consommations d’eau pour l’exploitation de l’installation nucléaire de base secrète de Pierrelatte (JO 11 avr. 2021, texte n28).

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