Préparation de la future PAC

Plus de mille participants au débat public, avec des positions souvent très opposées. Mais les décisions se prendront à Bruxelles.

Gelées de printemps ou pas, il y a au moins quelque chose qui a continué à couler au ministère de l’agriculture et de l’alimentation : l’encre dans les stylos des agents chargés de répondre aux propositions formulées lors du débat public sur le plan stratégique national de la politique agricole commune pour la période 2023-2027.

Si l’on en croit la présente décision, ils ont reçu 1 083 propositions, et ils ont répondu à chacune. Le ministère ne précise toutefois pas si chaque réponse était totalement individualisée, ce qui paraît peu probable.

Bien évidemment, compte tenu de ce nombre considérable de propositions et de la sensibilité extrême du sujet, les avis présentent toute la palette des opinions possibles. Le ministère s’est efforcé de les regrouper en quinze thèmes.

Le monde agricole a insisté sur certains concepts classiques, comme la souveraineté alimentaire, la défense de l’agriculture et la reconnaissance de son rôle, la régulation des marchés agricoles, les productions de proximité plutôt que les produits importés, la formation des agriculteurs et le renouvellement des générations ; s’y ajoutent la spécificité de l’agriculture d’outre-mer et la gestion des forêts.

Impacts de la production sur l’environnement

D’autres contributeurs ont exprimé « une demande de protection renforcée de l’environnement, en particulier concernant la préservation de la biodiversité et des ressources naturelles, comme l’eau et les sols, la lutte contre les dérèglements climatiques, la sobriété en intrants comme les pesticides, l’eau et les engrais d’origine non renouvelable ».

S’y ajoutent des demandes plus ciblées sur le bien-être animal, sur l’information des consommateurs à propos des produits alimentaires, de leur qualité, de leur provenance et de leurs conditions de production, notamment environnementales, ainsi que sur la transparence des décisions et des informations dans ces domaines.

D’autres questions ont pu être évoquées par des contributeurs provenant de tous les horizons, comme l’harmonisation au niveau européen des exigences sanitaires, environnementales et sociales, la nécessité d’engager une transition du modèle agricole, et une demande de concertation renforcée pendant le processus de réforme de la politique agricole commune et l’élaboration du plan stratégique national.

Demain, tout le monde à l’écorégime ?

Pour ce dernier point, les attentes portent surtout sur le contenu futur de certains dispositifs nouveaux comme l’écorégime du premier pilier, dont le rôle sera de rémunérer les services rendus par les pratiques et les systèmes agricoles favorables à l’environnement.

Sans la moindre surprise, le ministre décide de poursuivre la préparation du plan stratégique national : il n’aurait guère le choix, puisqu’il s’agit là d’une obligation fixée par le droit de l’Union européenne. Il promet de tenir compte des enseignements du débat public sur les objectifs de ce plan, sans préciser à ce stade de quelle manière et dans quelle proportion. Le public sera invité à réagir sur le projet dès que l’autorité environnementale aura rendu un avis sur l’évaluation environnementale de ce plan.

Le plan intégrera les enjeux économiques, environnementaux, sociaux et territoriaux mis en lumière par le débat public, et il en tiendra compte dans la définition des modalités des interventions, « dès lors qu’elles sont compatibles avec la subsidiarité laissée aux États membres dans la réglementation européenne » (NDLR : cette restriction est d’une importance considérable, compte tenu de la faible latitude laissée par Bruxelles dans ce domaine).

Cinq priorités (au moins)

La présente décision détaille dès à présent cinq priorités qui seront prises en compte par le plan stratégique national et que la France défendra dans les négociations, sans préciser si d’autres priorités s’y ajouteront ni comment elles seront classées. Il y a en effet des priorités plus prioritaires que d’autres.

L’une d’elles sera « un objectif d’accompagnement de la transition agro-écologique des exploitations, au travers d’une ambition environnementale renforcée en mobilisant, en cohérence, les différents leviers de l’architecture environnementale de la politique agricole commune, notamment la conditionnalité des aides, l’écorégime, les mesures agro-environnementales et climatiques, ainsi que le soutien à l’agriculture biologique ».

Une synthèse, facilitant la lecture par le public des grandes orientations du plan stratégique national, sera produite à l’issue de la négociation du règlement européen.

Décision du 3 avril 2021 consécutive au débat public sur le plan stratégique national de la politique agricole commune (JO 4 avr. 2021, texte n30).

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