o Réflexions en cours sur les prochains programmes des agences de l’eau

La baisse de leurs ressources visait à alléger les taxes sur les factures d’eau. Il faudra donc envisager de nouveaux financements à partir de 2025.

Question d’Amel Gacquerre, sénatrice (UC) du Pas-de-Calais :

Les dernières lois de décentralisation ont confié les compétences de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (Gemapi), d’assainissement et d’eau potable aux intercommunalités, mais ces transferts n’ont pas été suivis des financements correspondants. Aussi, en complément des subventions des agences de l’eau, un grand nombre d’intercommunalités ont pris leurs responsabilités et ont instauré une taxe Gemapi, afin d’accélérer leurs programmes d’investissement.

Aujourd’hui, le financement des opérations prévues est menacé en raison de la baisse des subventions des agences de l’eau. Pour rappel, en 2018, le Gouvernement a décidé d’accroître l’écrêtement du produit des redevances pour financer les opérateurs du ministère de l’environnement. En 2021, dans le cadre du plan France relance, le Gouvernement a cette fois-ci fortement mobilisé les crédits des agences pour financer des actions qui n’étaient pas prévues dans leurs programmes pluriannuels.

Depuis ces deux décisions, les agences de l’eau connaissent de graves difficultés financières. Elles ont d’ailleurs indiqué qu’en l’absence d’un soutien de l’État, elles seraient contraintes de réduire fortement le montant des aides qu’elles accordent aux intercommunalités et aux syndicats.

Je crois important d’illustrer mon propos par un exemple tiré de mon territoire, celui de la communauté d’agglomération de Béthune-Bruay, Artois-Lys Romane. En 2021, l’agence de l’eau Artois-Picardie a décidé de réduire son taux de subventionnement des opérations prévues au programme d’actions de prévention des inondations (Papi). En outre, elle ne subventionnera plus les travaux de renouvellement des réseaux d’eau potable et réduira son soutien à la lutte contre l’érosion.

En conséquence, le syndicat chargé de la préservation de la ressource en eau et de la prévention des inondations perdra en moyenne 3,4 M chaque année. Au total, ses pertes financières s’élèveront à près de 11 M d’ici à 2024.

Augmenter la taxe Gemapi ?

Pour répondre à ces difficultés, il serait certes possible d’augmenter la taxe Gemapi, mais la préservation du pouvoir d’achat des habitants est une préoccupation majeure de l’ensemble des élus, qui ne veulent pas envisager cette perspective.

La prévention des inondations et la préservation de la ressource en eau sont l’affaire de tous et non des seuls des territoires soumis aux aléas climatiques. Pouvez-vous nous assurer que l’État maintiendra les capacités financières des agences de l’eau pour répondre aux engagements qui ont été pris ?

Réponse du ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports, au nom de sa ministre :

Le plafonnement des recettes des agences de l’eau, qui a effectivement été abaissé en 2019, a permis de réduire d’environ 12 % la fiscalité appliquée à l’eau potable. Ce nouveau plafond a conduit les comités de bassin à baisser le taux des redevances affectées aux agences de l’eau pour éviter d’avoir à reverser le trop-perçu au budget général de l’État. Tel était bien l’objet de cette mesure.

En parallèle de cette baisse, le Gouvernement a mis un terme aux prélèvements sur la trésorerie des agences de l’eau au profit du budget général de l’État. Ces évolutions ont conduit à réduire le montant total des interventions des agences de l’eau à 12,63 Md dans le cadre de leurs onzièmes programmes prévus pour la période 2019-2024, ce qui a ensuite nécessité un recentrage des aides.

S’agissant de la Gemapi, les aides consacrées aux Papi ciblent en priorité les ouvrages qui ont un effet positif sur les milieux naturels et le bon état des masses d’eau. À titre d’exemple, dans le bassin Artois-Picardie, les taux d’aides s’élèvent à 40 % pour les ouvrages priorisés et à 20 % pour les autres. Le Papi du bassin de la Lys bénéficiera dans les trois ans de la moitié des crédits réservés aux Papi du bassin, soit 9 M, dont une rallonge de 1,8 M par rapport à l’enveloppe initialement prévue.

Concernant le petit cycle de l’eau, la communauté d’agglomération de Béthune-Bruay, Artois-Lys Romane a également bénéficié d’aides importantes de la part de l’agence en matière d’eau potable, d’assainissement et de gestion des eaux pluviales pour la période 2019-2021.

En 2021, les agences de l’eau ont également recouru aux crédits complémentaires du plan de relance, principalement au bénéfice des projets des collectivités en matière d’eau et d’assainissement.

Pour l’avenir, le rapport du sénateur Alain Richard et du député Christophe Jerretie sur les besoins en financement des agences de l’eau, élaboré dans le cadre des travaux du Comité pour l’économie verte, contribue à la réflexion sur la définition d’une nouvelle trajectoire pour la dépense publique en matière d’eau et de biodiversité, notamment dans la stratégie nationale pour la biodiversité, appelée Biodiversité 2030.

JO Sénat CR, 16 févr. 2022, p. 1691.

Retour