Réseaux d’eau potable : que faut-il penser de la déconnexion virtuelle ?

Diviser un réseau entre deux services gestionnaires impose-t-il de déconnecter les canalisations ?

Question de Sophie Taillé-Polian, sénatrice (Gest) du Val-de-Marne :

Neuf communes de mon département étudient le retour en régie de la distribution d’eau potable dans leur territoire. Jusqu’à présent, ce service est assuré par Véolia, dans le cadre d’une délégation de service public conclue avec le Syndicat des eaux d’Île-de-France (Sedif). Afin de rester libres de choisir les modalités futures de ce service, ces communes ont conclu avec le Sedif une convention provisoire, qui vient d’être prolongée d’un an.

Toutefois, si elles optent pour l’autonomie, le syndicat leur demande de déconnecter totalement leurs réseaux, ce qui entraînerait des travaux importants et très onéreux, alors que les communes souhaitent s’en tenir à une déconnexion virtuelle. Cette demande du Sedif semble contradictoire avec les recommandations formulées en 2016 dans un rapport du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD).

Quelle est la position du gouvernement sur le sujet de la rétrocession des biens aux collectivités territoriales, dans le cas d’une sortie des collectivités du syndicat de distribution et de la création d’une entité indépendante ? Quelle est sa position sur la technique de déconnexion virtuelle, qui permettrait de recourir à la régie publique en épargnant aux habitants des coûts exorbitants ?

Réponse de la secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable, au nom de la ministre de la transition écologique :

Sans vouloir m’immiscer dans des décisions dont l’opportunité relève directement de l’appréciation des communes et de leurs groupements, je peux vous apporter quelques éléments juridiques. Le principe de subsidiarité régit le choix du mode de gestion du service public de distribution d’eau potable, et aucun obstacle juridique ne s’oppose à la création d’une régie si elle est décidée par délibération de l’autorité compétente.

Éviter les coûts inutiles de restructuration des réseaux

Comme l’indiquait le CGEDD dans son rapport Eau potable et assainissement : à quel prix ? publié en 2016, il faut veiller à ce que « la recomposition des nouvelles autorités organisatrices évite des coûts inutiles de restructuration de réseaux ou de comptages entre nouvelles autorités ». Cette recomposition doit donc favoriser les interconnexions et les mutualisations d’ouvrages. Ainsi, les collectivités exerçant cette mission de service public doivent être garantes d’un usage rationnel de la redevance perçue auprès des usagers.

S’agissant de la rétrocession des biens, le code général des collectivités territoriales en organise les modalités. Ainsi, son article L. 5211-25-1 dispose que « les biens meubles et immeubles acquis ou réalisés postérieurement au transfert de compétences sont répartis entre les communes qui reprennent la compétence […] et le syndicat de communes ».

Quant aux biens nécessaires au fonctionnement du service public, ce sont des biens de retour qui peuvent revenir gratuitement en fin de contrat à l’autorité délégante, avec une possibilité d’indemnisation du délégataire pour les biens non amortis, sur la base de leur valeur nette comptable.

Enfin, le préfet de région de l’Île-de-France est bien informé de la situation que vous avez évoquée et il veillera à accompagner les collectivités locales, comme leurs syndicats, dans la démarche en cours et à faciliter aussi le bon déroulement de ces changements importants d’organisation, dans le respect des principes et des dispositions rappelés précédemment, ainsi que, bien évidemment, dans le respect des intérêts des usagers de l’eau du territoire.

JO Sénat CR, 7 mai 2021, p. 3491.

NDLR : apparemment, le gouvernement n’a rien à dire à propos de la déconnexion virtuelle…

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