o Suppression des moulins : raisonner au cas par cas

Il faut évaluer l’état, la situation et le potentiel hydroélectrique de chaque moulin avant de décider s’il peut être conservé.

Question de Vincent Segouin, sénateur (LR) de l’Orne :

La politique de suppression des moulins, au nom de la continuité écologique, inquiète les associations de défense des moulins de mon département. Voici deux ans, une secrétaire d’État m’avait assuré qu’il convenait de sauvegarder des moulins à forte valeur patrimoniale ou producteurs de petite hydroélectricité. Certains moulins appartenant à ces catégories sont pourtant en passe d’être détruits. Je m’interroge sur la constance de l’engagement de votre ministère à ce sujet et sur le respect de la parole ministérielle dans les administrations de nos départements.

Ces opérations portent atteinte à la biodiversité en favorisant les crues et les sécheresses. Elles constituent aussi une dépense importante d’argent public, sans effet bénéfique sur l’environnement. Il serait préférable d’investir dans la restauration des moulins et de mieux contrôler leur entretien, plutôt que d’essayer de les détruire à n’importe quel prix. Nous aurions aussi intérêt à développer la production d’électricité à partir de ces petites installations hydrauliques.

Je vous prie donc de clarifier la position du ministère au sujet de la politique de continuité écologique, ainsi que de la sauvegarde de notre patrimoine, et de nous assurer de la stabilité de cette position dans le temps.

Réponse de la ministre déléguée chargée du logement, au nom de la ministre de la transition écologique :

Il est indispensable de rétablir la continuité des cours d’eau pour réduire la fragmentation des rivières et préserver la biodiversité d’eau douce : on estime qu’environ 28 % des crustacés et 39 % des poissons d’eau douce sont menacés.

Cette politique de continuité des cours d’eau est ciblée : elle concerne 11 % des cours d’eau français et vise, jusqu’à 2027, environ 5 000 ouvrages sur tous les obstacles recensés en France. Depuis 2018, le gouvernement a souhaité renforcer la logique de conciliation avec les usages des ouvrages existants : barrages, piscicultures, installations pour pratiquer le canoë-kayak, autres éléments du patrimoine à valoriser, etc.

Concernant les moulins, la restauration de la continuité écologique est compatible avec la sauvegarde de notre patrimoine lié à l’eau. Différentes possibilités de restauration existent et, pour identifier la meilleure solution, le gouvernement a choisi de favoriser la concertation locale. Ainsi, c’est au cas par cas que la situation de l’ouvrage considéré est analysée, en prenant en compte les contraintes et les opportunités locales, qu’il s’agisse de la valeur historique, touristique ou économique ou des usages de loisir.

Le propriétaire du moulin doit « rester au centre de la décision »

Tous les moulins sont différents. Certains peuvent être remis en état de fonctionner sans exiger d’investissements trop importants, d’autres non ; certains font l’objet d’un projet territorial, d’un potentiel hydroélectrique rentable, d’autres non. Dans tous les cas, le propriétaire de l’ouvrage doit rester au centre de la décision. Les débats parlementaires récents ont montré que le sujet nécessitait un climat de confiance et que la concertation était plus efficace dans certains territoires que dans d’autres.

S’agissant de la petite hydroélectricité, la programmation pluriannuelle de l’énergie affiche une priorité à l’équipement de seuils existants, dans le respect de la restauration des milieux aquatiques. De nombreux projets avancent, tandis que d’autres peinent à trouver leur équilibre financier ; des outils, tels que la désignation de référents au sein des services, devraient permettre de mieux les accompagner.

Réplique de Vincent Segouin :

Il me semble que les services ne connaissent pas la formule « au cas par cas ». En effet, les concertations avec les propriétaires, comme avec les associations de défense des moulins, sont parfois inexistantes : on leur demande des études dont le coût est nettement supérieur à leurs capacités financières.

JO Sénat CR, 4 juin 2021, p. 4547.

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