Les annonces des crues ont progressé depuis 2021

L’enjeu est maintenant de faire évoluer en fonction du changement climatique les modèles qui prédisent les précipitations et leurs conséquences sur le terrain.

Question d’Anne Ventalon, sénatrice (apparentée LR) de l’Ardèche :

À l’heure où le climat s’emballe, les crues gagnent en fréquence, en violence et en soudaineté. C’est ainsi que, le 3 octobre 2021, la Beaume, qui traverse la commune ardéchoise de Vernon, a connu une crue sans précédent, seulement quatre heures après les fortes précipitations tombées sur les communes situées en amont.

Certes, des dispositifs d’alerte existent, notamment les cartes des zones inondées potentielles (ZIP), l’application Vigicrues ou le service Avertissement pluies intenses à l’échelle des communes (Apic). Mais ces indicateurs se révèlent insuffisants car pas assez précis. Dans l’exemple que j’ai pris, la commune située au pied des Cévennes ardéchoises n’a reçu qu’une alerte de niveau orange, alors qu’elle s’est trouvée frappée par une crue de quatre mètres.

Pourtant, si les prévisions avaient été fondées sur les quantités de pluie réellement tombées sur le haut du bassin versant, l’intensité et l’heure de la survenue de la crue auraient pu être annoncées avec précision au moins deux heures à l’avance à Vernon. Cela aurait conduit le maire à prendre des mesures adaptées afin de prévenir la catastrophe et d’en limiter les dégâts.

Interrogés, les services de l’État ont répondu qu’ils ne disposaient pas des moyens techniques permettant de réaliser cette évaluation en temps réel et qu’il appartenait aux élus de consulter les intensités de précipitations en amont afin d’évaluer eux-mêmes le risque encouru. Avec les formidables progrès en matière de calcul et l’essor de l’intelligence artificielle, serait-il possible de créer un dispositif d’alerte des crues fondées sur les précipitations tombant sur les bassins versants, ce dont les élus auront de plus en plus besoin ?

Réponse du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires :

Le site Vigicrues, géré par mon ministère, informe des risques de débordement pouvant survenir, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept. « En 2021, une vigilance de niveau orange, synonyme de risque de débordements très importants, a été déclenchée vingt-quatre heures après (sic) la crue spectaculaire que vous avez évoquée. »

Depuis, nous avons beaucoup progressé : les données dont nous disposons sont plus nombreuses, tout comme le sont les capacités de les modéliser davantage. Bien plus, il existe depuis un nouveau dispositif, FR-Alert. Prévenir le maire, c’est une chose, prévenir les habitants d’un territoire au moyen de SMS de la survenue potentielle d’un danger en est une autre. C’est pourtant une réalité depuis quelque mois.

Pour l’illustrer, je prendrai l’exemple de la vallée de la Vésubie, où je me suis rendu. Elle aussi a été frappée par des inondations records, directement corrélées au dérèglement climatique. En effet, les précipitations qui, en hiver, tombaient jusqu’à présent pour partie sous forme de neige dans la montagne et n’atteignaient pas la vallée, finissent, du fait de températures trop douces, par se produire sous forme de pluie : la quantité d’eau qui se déverse alors dans la vallée est telle qu’elle entraîne des crues absolument spectaculaires. Lors de ce dernier épisode, le dispositif FR-Alert d’envoi de SMS aux habitants du territoire touché a été activé, tout comme il l’a été dans le Pas-de-Calais avant la survenue de plusieurs inondations, une connexion étant désormais établie entre ce système d’alerte par messagerie et nos dispositifs de prévention.

Pour autant, je ne me satisfais pas de cette situation. Nous continuons donc d’augmenter le nombre de stations ZIP. Je n’entre pas dans le détail de ces outils et des autres dispositifs qui, grâce à des supercalculateurs, au développement de stations et à des logiciels de modélisation, permettent d’obtenir des précisions de plus en plus fines. L’accentuation du dérèglement climatique entraînant des phénomènes qui parfois vont plus vite ou sont plus intenses que ce que nous avons modélisé, il nous faut continuer à relever notre niveau de protection au fur et à mesure que le niveau de risque augmente.

JO Sénat CR, 7 févr. 2024, p. 614.

NDLR : Dans Vigicrues, le niveau orange signale un risque de crue génératrice de débordements importants, et non de débordements très importants. Et on ne voit pas l’intérêt de déclencher une vigilance le lendemain de la crue : le ministre a sans doute mal lu sa fiche, ou le service du compte rendu du Sénat s’est trompé dans sa transcription des débats. Ou alors c’est une application de la doctrine des carabiniers d’Offenbach…

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