o Eau et assainissement en 2026 : le flou persiste

Les ministres concernés répètent une nouvelle expression : il est possible de revoir l’intercommunalité, mais pas la mutualisation. Il restera à la préciser puis à la traduire dans le droit.

Question d’Alain Joyandet, sénateur (LR) de la Haute-Saône :

La loi Notre a imposé le transfert des compétences d’eau et d’assainissement aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, mais cette obligation a fait l’objet d’un certain nombre de remises en cause et d’assouplissements, au fil des ans, sous la pression notamment des communes rurales qui veulent conserver la gestion de ces services et le caractère facultatif de ce transfert.

La neuvième péripétie s’est produite ici même, au Sénat, quand votre ministre de tutelle a déclaré que les autorités organisatrices de ces services ne seraient pas nécessairement les intercommunalités, mais que ce ne seraient pas non plus les communes isolées. Qu’est-ce que cela signifie ?

Des milliers de communes attendent encore de savoir ce qu’elles doivent faire d’ici à 2026. Celles qui ont anticipé le transfert se retrouvent parfois dans des difficultés inextricables et souhaitent revenir en arrière. Dans mon département, il y a même une intercommunalité qui ne peut pas envoyer les factures d’eau à ses concitoyens depuis un an et demi.

Je ne dis pas qu’il ne faut pas faire le transfert ; j’estime simplement qu’il faut refaire de l’eau une compétence optionnelle et, surtout, laisser les élus locaux décider. Il est intolérable que des mesures venues d’en haut s’imposent à tout le monde, avec pour conséquence un triplement du prix de l’eau dans des communes rurales, sans que l’eau ait changé en quoi que ce soit. Que le tarif de l’eau augmente parce qu’on a fait des travaux pour améliorer les réseaux, la filtration ou la qualité, c’est normal. Mais si le service public coûte plus cher, cela doit correspondre à une amélioration.

Pourquoi casser ce qui marche bien chez nous, dans une petite commune où tout va bien, où l’eau est bonne, suffisante, où le fontainier, souvent bénévole, fait un travail extraordinaire depuis vingt-cinq ans, au prétexte qu’il faudrait que tout soit exactement pareil, quels que soient les territoires et la taille des collectivités ?

Réponse de la secrétaire d’État chargée de l’écologie :

Pour 88 % des communes, c’est déjà l’intercommunalité qui assume la compétence d’eau et d’assainissement. Cette mutualisation est donc largement enclenchée, tandis que les communes qui assument seules cette compétence sont concentrées dans certains départements. En annonçant le plan pour l’eau en 53 mesures, le chef de l’État a rappelé l’importance de la mutualisation pour la capacité d’ingénierie, d’investissement et d’innovation.

Nous ne souhaitons pas revenir sur le transfert obligatoire de l’eau et de l’assainissement. « S’il peut y avoir une remise en cause de l’intercommunalité, il n’en est aucunement de même pour la mutualisation. » L’échelon communal ne semble pas correspondre aux besoins, surtout pour les communes qui sont aujourd’hui en manque d’eau, particulièrement durant les périodes estivales.

Revoir l’intercommunalité mais pas la mutualisation

Une mission parlementaire va être lancée pour examiner les solutions aux situations où l’intercommunalité ne répondait pas aux besoins du territoire, et uniquement pour ce cas. Il est évidemment possible de revoir l’intercommunalité, mais pas la mutualisation. C’est l’esprit même de ce que le ministre a défendu, et que je réitère ici.

Réplique d’Alain Joyandet :

Vos propos ne répondent pas à ma question, puisque vous n’arbitrez pas. Je n’en suis d’ailleurs pas surpris. Vous savez tout de même qu’aujourd’hui une intercommunalité a la possibilité de prendre la compétence puis de décider, dans la demi-heure qui suit, de la redéléguer aux communes ! Faisons donc ainsi : demandons aux intercommunalités de délibérer, de prendre la compétence et de la redéléguer aux communes dans la demi-heure qui suit. Le texte en vigueur est ainsi !

Pourquoi ne pas clarifier les choses ? Je demande simplement de redonner aux élus locaux le pouvoir de décider. Dans mon département, depuis trente ans, il existe des syndicats intercommunaux. Pourquoi vouloir encore faire un truc alambiqué ? « Pas l’intercommunalité, mais pas la commune » : qu’est-ce que cela signifie ? Faut-il refaire une mission parlementaire, alors qu’il serait tellement facile de dire que, dans les communes de moins de 20 000 habitants par exemple, on remet l’eau dans les compétences optionnelles ? Un peu de simplification et de bon sens !

JO Sénat CR, 12 avr. 2023, p. 3634.

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