La géothermie profonde passe un mauvais quart d’heure

Question de Martine Wonner, députée (LT) du Bas-Rhin :

En un an, on a enregistré à Strasbourg dix séismes d’une magnitude supérieure à 2 sur l’échelle de Richter, dont un de 3,6 le 4 décembre dernier. Ces événements sismiques coïncident avec l’activité géothermique de la société Fonroche, qui procède à des tests en vue d’exploiter un puits dans la commune de Vendenheim, près de Strasbourg.

L’Alsace possède une richesse géothermale unique en France : dans son sous-sol, les eaux peuvent atteindre 200 °C, et six projets de géothermie sont en développement dans la région. Mais au vu des événements sismiques anormaux qui se sont produits, la préfète du Bas-Rhin a prononcé l’arrêt définitif des opérations de Fonroche à Vendenheim, sans pour autant remettre en cause les autres projets en cours. Or continuer à envoyer de l’eau à 5 000 m de profondeur, dans une faille géologique déjà sensible et instable, relève d’un pari pour le moins hasardeux au vu des connaissances scientifiques disponibles.

Sachant que l’entreprise Fonroche devra fermer le site de Vendenheim dans lequel elle a investi 100 M, et que le gouvernement a annoncé la fin des subventions pour la production d’électricité issue de la géothermie profonde, quelles garanties l’État a-t-il apportées aux opérateurs pour conforter leurs investissements ? Quelles sont les perspectives de la géothermie en Alsace ?

Réponse de la ministre déléguée chargée du logement, au nom de la ministre de la transition écologique :

En effet, Fonroche a cessé ses opérations à Vendenheim, conformément à l’arrêté préfectoral qui prévoit une surveillance sismique et une suspension des travaux quand les séismes dépassent une magnitude de 2 sur l’échelle de Richter. Après une tierce expertise par l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris) et le BRGM, des tests de traçage ont été autorisés pour déterminer si le forage géothermique était à l’origine des incidents.

Mais après la nouvelle secousse du 4 décembre, la préfète a prescrit l’arrêt de la boucle géothermique. Même s’il n’y a pas eu de dégâts matériels importants, des fissures sont apparues dans certains bâtiments, qui feront l’objet d’une prise en charge, conformément aux dispositions du code minier relatives à la responsabilité du titulaire en cas de dommages.

Il s’agit du premier incident dépassant une magnitude de 3 en France. Un comité d’experts, proposé par les services du ministère de la transition écologique, sera prochainement créé pour tirer les enseignements des événements récents, induits ou susceptibles d’être induits par la géothermie profonde.

Précisons que ces risques ne concernent ni la géothermie superficielle ni la géothermie profonde à basse température sur des nappes aquifères – et non sur des failles –, qui sont exploitées depuis plus de cinquante ans sans problème de sécurité. La géothermie reste une énergie renouvelable susceptible de nous aider à réduire notre empreinte carbone, mais elle doit être développée dans les meilleures conditions de sécurité pour nos concitoyens.

Réplique de Martine Wonner :

Vous ne m’avez pas répondu sur les garanties de l’État face aux investissements déjà réalisés de Fonroche et à ses engagements financiers. Peut-on la laisser poursuivre ses activités dans les autres sites ? Nous demandons que des engagements fermes soient pris afin que les Alsaciens ne soient pas soumis à des expérimentations, et que l’Alsace ne devienne pas un laboratoire incontrôlable de la géothermie. Je rappelle que notre territoire compte une faille profonde. Nous serons attentifs aux résultats des expertises, mais nous ne pourrons pas laisser Fonroche faire n’importe quoi.

AN, 12 janv. 2021, 1re séance.

Retour