Loi industrie verte : un peu d’industrie, beaucoup d’environnement

Au menu : une stratégie nationale pour une industrie verte, deux nouvelles procédures de consultation du public, le développement des énergies renouvelables sur les voies navigables, une réforme du dispositif des sites naturels de compensation et un petit verdissement des règles des marchés publics et des concessions.

Pour accélérer la transition écologique et la décarbonation de l’industrie, l’État élabore une stratégie nationale pour une industrie verte pour la période 2023-2030. Cette stratégie tient compte des contraintes et des spécificités des collectivités territoriales relevant des articles 73 et 74 de la Constitution.

Elle détermine les filières stratégiques qui doivent être implantées ou développées prioritairement sur le territoire national. Elle favorise la recherche et l’expérimentation de nouveaux produits et procédés contribuant à la transition écologique. Elle tient compte des objectifs et des trajectoires nationaux en matière de réduction de l’artificialisation des sols et de décarbonation. Elle définit les engagements attendus de l’ensemble des acteurs concernés, notamment en termes de réduction des incidences environnementales.

Lutte contre l’artificialisation des sols

Ce principe posé, la présente loi s’intéresse aussi à de nombreux sujets qui n’ont qu’un vague rapport avec son objet principal. Ainsi, en application de son article 3, les établissements publics fonciers créés par l’État et les établissements publics fonciers locaux mettent en place des stratégies foncières afin de mobiliser du foncier et de favoriser le développement durable, la lutte contre l’étalement urbain et la limitation de l’artificialisation des sols, y compris par des actions ou des opérations de renaturation.

L’article 4 de la loi porte sur les procédures de consultation du public régies par le code de l’environnement. Il entrera en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 23 octobre 2024. Pour les demandes d’autorisation environnementales, une nouvelle procédure de consultation est instaurée dans un nouvel article L. 181-10-1 du code de l’environnement : un commissaire enquêteur ou une commission d’enquête est chargé de conduire cette procédure pendant au moins trois mois.

Le public peut faire parvenir ses observations et ses propositions, pendant la durée de la consultation, par courrier électronique, par voie postale ou par toute autre modalité précisée dans l’avis d’ouverture de la consultation. Ces observations et propositions sont prises en considération par le maître d’ouvrage et par l’autorité compétente pour prendre la décision. Le rapport et les conclusions motivées du commissaire enquêteur ou de la commission d’enquête sont rendus publics. La décision ne peut être adoptée avant l’expiration d’un délai permettant la prise en considération des observations et propositions formulées pendant la consultation et des réponses du pétitionnaire.

Pas de consultation, pas de décision

Cette nouvelle procédure s’ajoute à celles qui sont déjà prévues par l’article L. 123-1-A du code de l’environnement. Un nouvel article L. 123-1-B précise que le juge administratif des référés fait droit à toute demande de suspension d’une décision prise sans que la participation du public sous l’une des formes mentionnées à l’article L. 123-1-A ait eu lieu, alors qu’elle était requise.

Toujours au titre des questions générales, un nouvel article L. 121-8-2 est ajouté au code de l’environnement par l’article 5 de la présente loi : lorsque plusieurs projets d’aménagement ou d’équipement sont envisagés sur un même territoire délimité et homogène au cours des huit années à venir, et que ces projets sont susceptibles de rentrer dans la compétence de la Commission nationale du débat public (CNDP) au titre du I de l’article L. 121-8 du code de l’environnement, un débat public global ou une concertation préalable globale peut être organisé pour l’ensemble de ces projets, à la demande d’une personne publique, qui saisit elle-même la CNDP.

Dans ce cas, tous ces projets, ainsi que ceux envisagés ultérieurement sur le même territoire et cohérents avec sa vocation, sont dispensés de débat public propre ou de concertation préalable propre si leur concrétisation débute au cours des huit années suivant la fin de ce débat public global ou de cette concertation globale. La CNDP peut toutefois décider, si elle l’estime nécessaire pour certains de ces projets, d’organiser un tel débat ou une telle concertation. Elle motive sa décision.

Énergies renouvelables sur les voies navigables

En application de l’article 11 et au plus tard le 23 avril 2025, Voies navigables de France (VNF) présente un rapport évaluant le potentiel et étudiant les conditions de développement de la production d’énergies renouvelables sur les voies navigables et sur leurs dépendances relevant du domaine public fluvial qui lui est confié et de son domaine privé, notamment sur ses friches et ses emprises inutilisées. Au plus tard un an après la publication de ce rapport, VNF publie une stratégie pluriannuelle, intitulée Voies navigables à énergie positive, de développement de la production d’énergies renouvelables valorisant le potentiel ainsi identifié.

Pour chaque type d’énergie renouvelable, cette stratégie intègre des objectifs de puissance installée et de puissance produite, un calendrier de réalisation et les modalités de financement et d’exploitation des installations de production afférentes. Elle précise, le cas échéant, les modalités de partage de la valeur ainsi générée au bénéfice des collectivités territoriales qui contribuent aux charges de gestion du domaine public fluvial et à sa gestion hydraulique, et la manière dont VNF contribue à l’objectif de valorisation des friches et du foncier au service du développement des énergies renouvelables et de l’industrie verte. Elle est actualisée après chaque nouvelle programmation pluriannuelle ou loi quinquennale.

L’article 14 alourdit et diversifie les sanctions qui peuvent être prononcées en application de l’article L. 171-7 du code de l’environnement, lorsque des installations ou ouvrages sont exploités, des objets et dispositifs sont utilisés ou des travaux, opérations, activités ou aménagements sont réalisés sans avoir fait l’objet de l’autorisation, de l’enregistrement, de l’agrément, de l’homologation, de la certification ou de la déclaration requis en application de ce code, ou sans avoir tenu compte d’une opposition à déclaration.

Sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation

L’article 15 crée un nouvel outil de réparation des atteintes à l’environnement : les sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation, qui se substituent aux sites naturels de compensation. Un nouvel article L. 163-1-A du code de l’environnement, qui remplace l’article L. 163-3, précise que ces sites peuvent accueillir des opérations de restauration ou de développement d’éléments de biodiversité, mises en place par des personnes publiques ou privées. Le gain écologique de ces opérations est identifié par des unités de compensation, de restauration ou de renaturation. Ces unités peuvent être vendues par les personnes à l’origine d’une opération à toute autre personne publique ou privée.

Les sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation font l’objet d’un agrément préalable de l’autorité administrative compétente. La délivrance de l’agrément prend notamment en compte le gain écologique attendu, l’intégration du site dans les continuités écologiques, sa superficie et les pressions anthropiques s’exerçant sur ce site. Toute personne soumise à une obligation de prendre des mesures de compensation des atteintes à la biodiversité peut y satisfaire de manière anticipée par l’utilisation ou l’acquisition d’unités de compensation, de restauration ou de renaturation.

Un décret précisera les modalités d’application de ce nouvel article, notamment les modalités d’agrément et de suivi des sites et la nature et les modalités de vente des unités de compensation, de restauration ou de renaturation. En outre, au plus tard le 23 octobre 2025, selon des modalités fixées par décret, l’État mettra en place une plateforme en ligne de référencement des unités de compensation, de restauration ou de renaturation.

L’article 25 modifie l’article 12 de la loi n2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture. Cet article 12 permet au Gouvernement de légiférer par ordonnance sur certains sujets, et le présent texte y ajoute la possibilité d’introduire dans le code de la commande publique un dispositif d’exclusion des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession, à l’appréciation de l’autorité contractante, à l’encontre des opérateurs économiques qui ne satisfont pas aux obligations de publication d’informations prévues par la directive 2022/2464 du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) n537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises.

La présente loi modifie en outre certaines dispositions du code de la commande publique. On en retiendra que les acheteurs qui sont soumis à ce code et dont le montant total annuel des achats est supérieur à un montant fixé par voie réglementaire adoptent un schéma de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables. Enfin, pour les marchés publics comme pour les contrats de concession, le choix de l’offre peut notamment reposer sur des critères environnementaux.

Loi no 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte (JO 24 oct. 2023, texte n1).

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