Marchés publics : différence entre un sous-traitant et un prestataire de services

Outre des considérations sans intérêt sur la nature du Conseil national de règlement des plaintes, l’organisme roumain qui a demandé une décision préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), cet arrêt tranche le cas assez inhabituel d’un marché public portant sur un domaine soumis à des obligations particulières par le droit national.

Des critères issus d’une réglementation spéciale

Au principal, la CJUE se fonde sur l’article 58 de la directive 2014/24/UE du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics, lu en combinaison avec les principes de proportionnalité et de transparence garantis à l’article 18, paragraphe 1, premier alinéa, de cette directive. En application de ces dispositions, elle décide qu’un pouvoir adjudicateur peut imposer comme critères de sélection des obligations issues de réglementations spéciales applicables à des activités qui sont susceptibles de devoir être réalisées dans le cadre de l’exécution d’un marché public, même si ces obligations n’ont pas une importance significative.

En revanche, ces principes de proportionnalité s’opposent à ce que les documents de marché soient automatiquement complétés par des critères de qualification résultant de réglementations spéciales applicables à des activités liées au marché à attribuer, si ces critères n’ont pas été prévus dans ces documents et si le pouvoir adjudicateur n’a pas entendu les imposer aux opérateurs économiques concernés. Le concurrent évincé qui avait avancé cet argument est pour ses frais sur ce point.

Quant à l’article 63 de la même directive, qui porte sur la sous-traitance, il s’oppose à ce qu’un soumissionnaire soit exclu d’une procédure de passation de marché au motif qu’il n’a pas désigné le sous-traitant auquel il entend confier l’exécution d’obligations résultant de réglementations spéciales applicables aux activités liées au marché en cause et non prévues dans les documents de marché, lorsque ce soumissionnaire a précisé dans son offre qu’il exécuterait ces obligations en recourant aux capacités d’une autre entité sans toutefois être lié à cette dernière par un contrat de sous-traitance.

Choisir un prestataire sans se fonder sur sa capacité

Dans le cas présent, le soumissionnaire a choisi de conclure un contrat de prestation de services, et le prestataire concerné ne fait pas partie des entités sur la capacité desquelles le soumissionnaire entend se fonder afin de démontrer le respect des critères pertinents. La CJUE valide ce montage.

Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 26 janvier 2023 (demande de décision préjudicielle du Consiliul Naţional de Soluţionare a Contestaţiilor — Roumanie) — SC NV Construct SRL / Judeţul Timiş (Affaire C-403/21, NV Construct) (Renvoi préjudiciel – Article 267 TFUE – Notion de « juridiction nationale » – Critères – Indépendance et caractère obligatoire de la juridiction de l’organisme national concerné – Stabilité des membres de cet organisme – Directive 2014/24/UE – Procédures de passation des marchés publics – Article 58 – Critères de sélection – Possibilité d’inclure, dans ces critères, des obligations issues de réglementations spéciales applicables aux activités liées au marché en cause et non prévues en tant que critère de sélection dans les documents de marché – Article 63, paragraphe 1 – Soumissionnaire recourant aux capacités d’une autre entité pour satisfaire aux exigences du pouvoir adjudicateur – Impossibilité d’imposer le recours à la sous-traitance) (JOUE C 94, 13 mars 2023, p. 6).

Retour