Nitrates : les Pays-Bas obtiennent une dernière dérogation

La Commission européenne estime qu’au bout de vingt ans, la situation aurait dû être normalisée. Les Pays-Bas n’auront plus de dérogation après 2025.

Régulièrement depuis 2005, les Pays-Bas demandent une dérogation à la directive nitrates, et régulièrement la Commission européenne la leur accorde. La dernière, qui a expiré le 31 décembre 2021, était moins généreuse que les précédentes, pour inciter le royaume à lutter contre les fraudes en matière de gestion des effluents. Il s’agissait en quelque sorte d’un premier avertissement sans frais.

Les derniers relevés communiqués par les Pays-Bas ont mis en lumière la bonne situation des eaux superficielles en matière de nitrates, avec seulement 1 % des stations de surveillance au-dessus de 50 mg/l de nitrates entre 2016 et 2019 ; le climat très humide du pays en est certainement une cause majeure. En revanche, pour les eaux souterraines, ce seuil est dépassé dans 8 % des stations de surveillance. Et durant cette période, 58 % des masses d’eau douce étaient eutrophes et 10 % d’entre elles étaient susceptibles de le devenir si aucune mesure n’était prise.

En outre, certaines provinces affichent des résultats nettement plus médiocres, en particulier le Limbourg, la Zélande et la Frise. Et les données communiquées par les Pays-Bas en 2020 et 2021 ont montré une augmentation des concentrations de nitrates dans les eaux souterraines des zones présentant des sols d’argile, de sable et de lœss.

Le programme d’action en vigueur a dû être durci

Les Pays-Bas appliquent un programme d’action à l’ensemble de leur territoire, le septième étant en vigueur pour la période 2022-2025. Il se décline en objectifs différents selon les régions, en fonction du niveau de pollution par les nutriments et du type de sol. Dans sa version initiale, il a été jugé insuffisant par le comité d’experts mandaté par l’État pour rendre un avis scientifique. Il a donc dû faire l’objet d’un addendum, qui définit une approche intégrée en matière de nature, d’eau et de climat, y compris les rejets d’azote, afin de satisfaire aux exigences de l’Union en matière d’environnement et de climat.

En vertu de ces deux textes, dix régions doivent faire des efforts pour réduire les concentrations en nitrates dans les eaux souterraines, dont des efforts importants pour quatre d’entre elles. De même, pour réduire les concentrations en phosphore dans les eaux superficielles, douze régions doivent faire des efforts, dont six des efforts importants.

En outre, les Pays-Bas ont jusqu’à fin 2023 pour désigner des zones polluées par les nitrates et le phosphore à partir de sources agricoles, dites zones polluées par les nutriments. Elles devraient inclure toutes les zones de captage concernées par des points de surveillance faisant apparaître une pollution moyenne par les nitrates ou des phénomènes occasionnels de pollution par les nitrates, ou des risques de pollution ou des tendances à la hausse, ainsi que par des points de surveillance où une eutrophisation ou un risque d’eutrophisation ont été constatés.

Zones polluées par les nutriments

Si cette désignation n’est pas réalisée avant 2024, toutes les régions qui doivent faire des efforts seront désignées comme zones polluées par les nutriments.

Puisque la précédente dérogation n’avait été accordée que pour deux ans, celle-ci s’étendra sur quatre ans, jusqu’à fin 2025. Cette durée doit permettre à l’État d’accompagner les exploitations agricoles bénéficiaires vers de nouveaux modes d’élevage plus respectueux de l’environnement, et en particulier moins intensifs. Les Pays-Bas sont en effet l’État membre qui élève le plus d’animaux par rapport à sa population. On peut considérer que cette dérogation sera la dernière.

Par conséquent, le pays doit surveiller la quantité d’effluents produite et veiller à ce que la production d’effluents au niveau national ne dépasse pas 490 000 tonnes d’azote et 150 000 tonnes de phosphate. Une fois appliquées les réformes promises par l’addendum, il faudra descendre à 440 000 t d’azote et à 135 000 t de phosphate, à partir de 2025. Et à partir de 2023, les dérogations au plafond d’épandage ne devront plus être accordées dans certaines zones, dont les zones de protection des eaux souterraines. À partir de 2024, là où les eaux souterraines sont polluées par les nitrates, ces zones de protection devront faire l’objet de mesures visant à réduire les charges de nutriments.

Bandes tampons le long de tous les cours d’eau en zone agricole

À partir de 2023, des bandes tampons, larges de 1 m, 3 m ou 5 m selon les cas, devront être instaurées le long de tous les cours d’eau traversant des parcelles agricoles. Dans les zones polluées par les nutriments, le taux global de fertilisation à partir d’engrais organiques et chimiques sera progressivement réduit afin qu’en 2025, les taux soient inférieurs de 20 % à ceux qui figurent dans l’annexe de l’actuel programme d’action sur les nitrates. Si la révision prévue des normes de fertilisation fixe des valeurs inférieures, ces dernières prévalent.

La stratégie de contrôle renforcé pour prévenir la fraude doit être poursuivie et étendue à d’autres zones qui seront identifiées comme étant à haut risque de non-respect délibéré des règles nationales relatives aux effluents. Pour ce faire, il faudra affecter davantage d’inspecteurs et de contrôleurs à cette stratégie.

Le plus important est que, pour la première fois depuis 2005, les plafonds dérogatoires sont réduits chaque année : 230 kg d’azote par hectare et par an dans les zones polluées par les nutriments et 250 kg d’azote par hectare et par an dans les autres zones en 2022 ; mais seulement 190 kg ou 200 kg, selon la zone, en 2025. Les autres conditions sont à peu près identiques à celles des dérogations précédentes.

Décision d’exécution (UE) 2022/2069 de la Commission du 30 septembre 2022 accordant aux Pays-Bas une dérogation demandée en application de la directive 91/676/CEE du Conseil concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles (JOUE L 277, 27 oct. 2022, p. 195).

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