o Au menu du huitième programme d’action pour l’environnement

Six objectifs principaux sont fixés. Pour la première fois, les progrès vers leur réalisation seront suivis en direct grâce à quelques indicateurs clés.

Entre 2014 et 2020, la politique de l’Union européenne en matière d’environnement a été encadrée par le septième programme d’action pour l’environnement (7PAE). Un an avant son achèvement, la Commission européenne en a évalué les effets, et son rapport est globalement positif.

Toutefois, elle a relevé que, en dépit d’objectifs environnementaux de plus en plus ambitieux dans de nombreux domaines d’action, les dépenses en matière de protection de l’environnement sont demeurées constantes en Europe, à environ 2 % du produit intérieur brut, et que les carences dans l’application de la législation environnementale coûtent à l’économie de l’Union environ 55 Md par an, en dépenses de santé et en coûts directs pour l’environnement. L’efficacité du 7PAE aurait pu être renforcée au moyen d’un mécanisme de suivi plus solide.

Protéger et renforcer le patrimoine naturel

C’est pourquoi le pacte vert pour l’Europe, publié par la Commission le 11 décembre 2019, « vise à transformer l’Union en une société juste et prospère, dotée d’une économie durable, compétitive, neutre sur le plan climatique et efficace dans l’utilisation des ressources, et à protéger, préserver et renforcer le patrimoine naturel de l’Union tout en améliorant la qualité de vie des générations actuelles et futures. La priorité devrait être d’atteindre rapidement les objectifs en matière de climat et d’environnement tout en protégeant la santé et le bien-être des personnes contre les risques et les incidences environnementaux et en assurant une transition juste et inclusive. » Tout un programme…

Ce pacte vert pour l’Europe sous-tend le plan de relance Next Generation EU, qui « promeut les investissements dans les secteurs essentiels pour la transition écologique et numérique afin de renforcer la résilience et de créer de la croissance et des emplois dans une société juste et inclusive ». La facilité pour la reprise et la résilience, qui alimentera la reprise économique de l’Union après la crise du Covid-19 avec le budget de l’Union pour la période 2021-2027, se base également sur les objectifs prioritaires énoncés dans le pacte vert pour l’Europe.

De plus, toutes les initiatives relevant du plan de relance Next Generation EU doivent respecter, le cas échéant, le principe consistant à ne pas causer de préjudice important. Ce plan de relance doit permettre d’accélérer le rythme de la transition vers la neutralité climatique et la protection de l’environnement.

Un mécanisme de suivi du 8PAE plus efficace

En présentant un projet de 8PAE, qui sera en vigueur jusqu’au 31 décembre 2030, la Commission a annoncé que ce programme comporterait un nouveau mécanisme de suivi, afin de garantir que l’Union restera sur sa trajectoire pour atteindre ses objectifs environnementaux.

Ses objectifs prioritaires fixent des orientations pour l’élaboration des politiques de l’Union, en s’appuyant sur les engagements pris dans le cadre des stratégies et initiatives du pacte vert pour l’Europe, telles que la stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030, le nouveau plan d’action pour une économie circulaire, la stratégie pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques et le plan d’action « zéro pollution ».

« Le 8PAE vise à accélérer la transition écologique vers une économie circulaire, neutre sur le plan climatique, durable, non toxique, efficace dans l’utilisation des ressources, fondée sur les énergies renouvelables, résiliente et compétitive, d’une manière juste, équitable et inclusive, et à protéger, restaurer et améliorer l’état de l’environnement, y compris en arrêtant et inversant la perte de biodiversité. Il soutient et renforce une approche intégrée des politiques et de la mise en œuvre, en s’appuyant sur le pacte vert pour l’Europe. » Il est fondé sur les principes de précaution, d’action préventive, de correction de la pollution à la source et du pollueur-payeur.

Il comprend six objectifs thématiques, prioritaires et interdépendants, parmi lesquels la réduction des émissions de gaz à effet et serre et le renforcement des absorptions par les puits naturels dans l’Union, l’amélioration de la capacité d’adaptation au changement climatique et de la prévention des catastrophes naturelles, la transition vers une économique circulaire non toxique qui utilise les ressources de manière efficace et durable, la recherche d’une pollution zéro, notamment de l’eau et des sols, et la protection des écosystèmes.

Le cinquième objectif est très ambitieux : « la protection, la préservation et le rétablissement de la biodiversité marine et terrestre et de la biodiversité des eaux intérieures à l’intérieur et à l’extérieur des zones protégées, notamment en arrêtant et en inversant la perte de biodiversité et en améliorant l’état des écosystèmes et leurs fonctions ainsi que les services qu’ils fournissent, et en améliorant l’environnement, en particulier l’air, l’eau et le sol, ainsi qu’en luttant contre la désertification et la dégradation des sols ».

Impact environnemental de la consommation

Le sixième objectif est sans doute utopique : « la promotion des aspects environnementaux de la durabilité et la réduction significative des principales pressions sur l’environnement et le climat liées à la production et à la consommation de l’Union, en particulier dans les domaines de l’énergie, de l’industrie, des bâtiments et des infrastructures, de la mobilité, du tourisme, du commerce international et du système alimentaire ». Ce système alimentaire inclut l’agriculture, la pêche et l’aquaculture.

Pour parvenir à réaliser ces six objectifs, la Commission, les États membres, les autorités régionales et locales et les parties prenantes doivent appliquer et faire appliquer la totalité du droit de l’Union en matière d’environnement, y compris en infligeant des sanctions et en luttant contre la criminalité environnementale.

Ils doivent renforcer l’approche intégrée dans l’élaboration et la réalisation des politiques, en intégrant les objectifs prioritaires du 8PAE dans toutes les autres politiques concernées, y compris au plan local, pour que ces politiques soient compatibles avec ces objectifs, et évaluer régulièrement les politiques existantes en proposant si nécessaire des modifications.

Ils doivent élaborer un tableau de bord synthétique et un ensemble d’indicateurs en se fondant sur un rapport qui recensera les indicateurs existants pour suivre les progrès sociaux, économiques et environnementaux, et qui proposera des mesures pour les rationaliser.

Ils doivent renforcer les « incitations positives » du point de vue environnemental et supprimer progressivement les subventions préjudiciables à l’environnement, en commençant par les aides aux combustibles fossiles ; pour les autres aides préjudiciables, la Commission et les États membres élaboreront d’abord une méthodologie, puis ils verront ce qu’ils peuvent en faire.

10 % du budget de l’Union en faveur de la biodiversité

Ils doivent intégrer l’action en faveur de la biodiversité dans les politiques de l’Union et lui consacrer 7,5 % du budget de l’Union en 2024 et 2025, et 10 % en 2026 et 2027 ; une méthodologie efficace devra permettre de contrôler le respect de cet objectif. Ils doivent renforcer le remplacement des substances préoccupantes et d’autres produits chimiques indésirables pour la santé, l’environnement et la biodiversité.

Ils doivent lutter contre la dégradation des terres et assurer la protection et l’utilisation durable des sols, notamment par une proposition législative spécifique sur la santé des sols d’ici à 2023 (NDLR : il s’agit là d’un serpent de mer, qui fait une petite apparition dans ce texte largement incantatoire). Ils doivent transformer le système alimentaire de l’Union de manière à ce qu’il contribue à la protection et au rétablissement de la biodiversité.

Ils doivent exploiter pleinement les approches écosystémiques et les infrastructures vertes, y compris les solutions fondées sur la nature respectueuses de la biodiversité, tout en veillant à ce que leur emploi rétablisse la biodiversité, améliore l’intégrité et la connectivité des écosystèmes et ne compromette pas les mesures prises pour protéger la biodiversité ou réduire les émissions de gaz à effet de serre. Pour ces solutions fondées sur la nature, ils doivent utiliser les outils et méthodologies existants, mais aussi améliorer les méthodes de suivi, les outils d’évaluation et les indicateurs mesurables.

Développer la comptabilité environnementale

Ils doivent veiller à ce que les politiques et les actions en matière d’environnement, menées au niveau de l’Union ainsi qu’au niveau national, régional et local, soient fondées sur les meilleures connaissances scientifiques et technologies disponibles ; pour cela, ils doivent renforcer et utiliser la base de connaissances environnementales, et poursuivre le développement de la comptabilité environnementale et écosystémique. Ils doivent en particulier améliorer les connaissances sur la capacité des différents écosystèmes à servir de puits et de stocks de gaz à effet de serre.

Ils doivent contribuer à aider la société, les autorités publiques, les citoyens et les communautés, les partenaires sociaux et le secteur privé à déterminer les risques climatiques et environnementaux, à évaluer leur impact et à prendre des mesures pour prévenir ces risques, les atténuer et s’y adapter, ainsi qu’accroître leur détermination à combler les lacunes en matière de connaissances, notamment en encourageant l’observation et le signalement par les citoyens des problèmes environnementaux et des lacunes en matière de conformité.

Ils doivent appliquer effectivement des normes élevées en matière de transparence, de participation du public et d’accès à la justice, conformément à la convention d’Aarhus, tant au niveau de l’Union que dans les États membres. En particulier, sans violer les secrets protégés par les lois en vigueur, ils doivent rendre publiques, facilement accessibles et faciles à comprendre les données et les informations permettant de suivre la réalisation du 8PAE.

Publication de l’état d’avancement du 8e PAE

La Commission, avec l’Agence européenne de l’environnement (AEE) et celle des produits chimiques (ECHA), suit et évalue chaque année les progrès réalisés par l’Union et les États membres pour atteindre les objectifs prioritaires du 8PAE, et communique chaque année des informations sur ces progrès, qui sont publiées et facilement accessibles. Pour cela, au plus tard le 2 mai 2022, elle présente un cadre de suivi, sur la base d’un nombre limité d’indicateurs clés. Ce suivi et cette évaluation sont fondés sur une méthodologie qui permet de mesurer le chemin restant à accomplir pour réaliser les objectifs prioritaires du présent programme.

L’AEE et l’ECHA aident la Commission à améliorer la disponibilité et la pertinence des données, des indicateurs et des connaissances, notamment en récoltant, en traitant et en communiquant des données et des informations au moyen d’outils numériques modernes et recourant à l’intelligence artificielle, tout en améliorant les méthodologies de collecte et de traitement des données et de mise au point d’indicateurs harmonisés. Elles intègrent des données provenant d’autres sources disponibles, comme les données satellitaires et celles du système européen d’information sur la biodiversité, du système d’identification des parcelles agricoles et du système européen de sensibilisation aux inondations.

Elles mettent au point des outils quantitatifs et qualitatifs, y compris des prévisions et des modèles, qui pourront fournir des informations sur les futures incidences potentielles des politiques liées à l’environnement et au climat à l’échelle du système et sur la distance restant à parcourir pour atteindre les objectifs prioritaires. Elles améliorent la disponibilité et l’interopérabilité des données ainsi que l’accès à celles-ci dans le cadre des programmes de l’Union. Elles garantissent la transparence et le respect de l’obligation de rendre des comptes (NDLR : c’est là plutôt le travail de la Commission).

Examen à mi-parcours des progrès accomplis

Au plus tard le 31 mars 2024, la Commission procède à un examen à mi-parcours des progrès accomplis dans la réalisation des objectifs thématiques prioritaires du 8PAE, ainsi que des progrès accomplis dans le suivi et l’évaluation du changement systémique. Elle se fonde pour cela sur les évaluations déjà réalisées.

Dans le rapport qu’elle transmet au Parlement européen et au Conseil, elle peut proposer des modifications aux indicateurs clés. Si nécessaire, elle peut proposer une proposition législative visant à ajouter une annexe au 8PAE pour la période postérieure à 2025, contenant une liste d’actions en vue d’atteindre ces objectifs. Elle assortit chaque action proposée d’un échéancier.

Au plus tard le 31 mars 2029, la Commission procède à une évaluation finale du 8PAE. Elle remet au Parlement européen et au Conseil un rapport contenant les principales constatations de cette évaluation, suivi, le cas échéant, d’une proposition législative concernant le 9PAE, au plus tard le 31 décembre 2029.

Décision (UE) 2022/591 du Parlement européen et du Conseil du 6 avril 2022 relative à un programme d’action général de l’Union pour l’environnement à l’horizon 2030 (JOUE L 114, 12 avr. 2022, p. 22).

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