o On peut continuer à juger toutes les atteintes à l’environnement

Si une nouvelle procédure vise les seules atteintes non négligeables, cela n’affecte pas les procédures classiques qui peuvent viser les autres atteintes.

Saisi par deux associations de protection de l’environnement, le Conseil constitutionnel est invité à trancher une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article 1247 du code civil, dans sa rédaction résultant de la loi n2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages : « Est réparable, dans les conditions prévues au présent titre, le préjudice écologique consistant en une atteinte non négligeable aux éléments ou aux fonctions des écosystèmes ou aux bénéfices collectifs tirés par l’homme de l’environnement. »

Les associations requérantes reprochent à ces dispositions de ne prévoir aucune réparation des atteintes à l’environnement considérées comme négligeables. En outre, en omettant de définir ce que recouvre une atteinte non négligeable, ces dispositions méconnaîtraient le principe de clarté de la loi et l’objectif d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi. Elles accusent ainsi les mots « non négligeable » de méconnaître, en particulier, l’article 4 de la Charte de l’environnement et le principe de responsabilité résultant de l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

Le raisonnement suivi par le Conseil constitutionnel au sujet de l’article 4 de la Charte de l’environnement ne présente guère d’intérêt, puisque cet article renvoie précisément à la loi le soin de définir les modalités de réparation des dommages causés à l’environnement. Et il résulte des travaux préparatoires de la loi du 8 août 2016 que le législateur a entendu appliquer cet article.

Pas de limitation de la réparation en cas d’atteinte à l’environnement

Concernant le second grief, la présente décision apporte une précision intéressante : « Les dispositions contestées n’ont ni pour objet ni pour effet de limiter la réparation qui peut être accordée aux personnes qui subissent un préjudice du fait d’une atteinte à l’environnement. Par conséquent, elles ne méconnaissent pas le principe, résultant de l’article 4 de la Déclaration de 1789, selon lequel tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

Autrement dit, l’article 1247 du code civil ouvre une voie spécifique pour la réparation des atteintes non négligeables à l’environnement, mais il ne ferme pas pour autant les voies classiques pour mettre en jeu la responsabilité de l’auteur d’atteintes à l’environnement, y compris si elles sont négligeables au sens de cet article. Par conséquent, ainsi commentés, les mots « non négligeables » sont conformes à la Constitution.

Décision no 2020-881 QPC du 5 février 2021 (JO 6 févr. 2021, texte n65).

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