o Protection des captages : une disposition transitoire est inconstitutionnelle

On ne peut pas traiter différemment des propriétaires juste pour éviter quelques formalités aux élus locaux.

Saisi par le Conseil d’État d’une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel se penche sur le paragraphe IX de l’article 61 de la loi n2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, qui a réformé la procédure d’instauration des périmètres de protection des captages d’eau potable prévue à l’article L. 1321-2 du code de la santé publique.

Ce IX évince de cette simplification certains captages « pour lesquels un arrêté d’ouverture d’une enquête publique relative à l’instauration d’un périmètre de protection a été publié à la date de publication de la présente loi ».

Selon les requérants, en limitant la protection de certains captages à l’instauration d’un simple périmètre de protection immédiate, le législateur aurait reconnu que l’adjonction d’un périmètre de protection rapprochée n’était plus nécessaire pour assurer la protection de la qualité de l’eau dans ces captages.

Servitudes importantes dans les périmètres de protection rapprochée

La mise en place d’un tel périmètre étant susceptible d’entraîner d’importantes servitudes pour les propriétaires des terrains qui en sont grevés, le législateur ne pouvait dès lors prévoir le maintien du régime antérieur en se fondant sur le seul critère tenant à la publication d’un arrêté d’ouverture d’une enquête publique. Il en résulterait une atteinte disproportionnée au droit de propriété et une méconnaissance des principes d’égalité devant la loi et devant les charges publiques.

Le Conseil constitutionnel suit intégralement leur argumentation : « Si la différence de traitement qui résulte de la succession de deux régimes juridiques dans le temps n’est pas, en elle-même, contraire au principe d’égalité, le législateur a, en l’espèce, établi une différence de traitement entre les propriétaires de terrains situés à proximité de captages d’eau, selon qu’a ou non été publié, au jour de la publication de la loi, un arrêté d’ouverture d’une enquête publique en vue de l’éventuelle instauration d’un périmètre de protection.

Pas de différence de situation objective

« Or le critère ainsi retenu ne rend pas compte d’une différence de situation, au regard de l’objet de la loi modifiant le régime des périmètres de protection, [avec] les propriétaires qui ne sont pas déjà soumis à un tel périmètre. Il vise, non à éviter la remise en cause des périmètres existants, mais seulement, ainsi qu’il ressort d’ailleurs des travaux préparatoires, à dispenser les personnes publiques ayant engagé une procédure d’instauration de périmètres avant la publication de la loi d’avoir à la reprendre pour la compléter.

« Toutefois, compte tenu des conséquences limitées de l’application des nouvelles règles sur les procédures en cours, ce motif n’est pas de nature à justifier que les propriétaires en cause soient exclus du bénéfice de ces règles et, de ce fait, soient susceptibles de se voir imposer les servitudes afférentes à un périmètre de protection rapprochée.

« Il résulte de ce qui précède que les dispositions contestées méconnaissent le principe d’égalité devant la loi. Par conséquent, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs, elles doivent être déclarées contraires à la Constitution. » Aucun motif ne justifie de reporter les effets de cette déclaration d’inconstitutionnalité, qui intervient donc à compter du 13 février 2021 et s’applique à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date.

Décision no 2020-883 QPC du 12 février 2021 (JO 13 févr. 2021, texte n106).

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