o Valorisation des sédiments issus des dragages

Pour commencer, les usines à béton des Hauts-de-France pourront en utiliser 300 000 tonnes par an.

Question de Jean-Pierre Decool, sénateur (Indep) du Nord :

Mon département compte 680 kilomètres de voies d’eau, 90 écluses et plus de 100 ouvrages de régulation des niveaux d’eau. Les sédiments, essentiellement non dangereux, s’y accumulent inévitablement. Le droit communautaire considère les sédiments comme des déchets. Cela implique une procédure coûteuse de traitement. L’entretien des voies d’eau est donc empêché, tandis que l’excès de sédiments dans les canaux génère régulièrement des entraves à la navigation, mais pas seulement.

Dans les Hauts-de-France, la gestion des eaux est primordiale pour contribuer efficacement à la lutte contre les inondations. En effet, des canaux, rivières et bassins entretenus seraient plus à même d’accueillir des crues liées à de fortes précipitations. Des canaux curés pourraient agir comme des bassins de rétention et de régulation.

La France accuse du retard dans la définition d’un cadre réglementaire national de valorisation des sédiments, ce qui a favorisé le développement de filières de valorisation dans les pays voisins. J’ai eu l’occasion d’évoquer cette problématique dans cet hémicycle à la suite des fortes inondations que le Nord a connues en décembre 2021 et lors d’un retour d’expérience placé sous l’autorité du préfet et organisé avec les acteurs de terrain, notamment avec Voies navigables de France (VNF), le 17 décembre 2021.

Je tiens par ailleurs à saluer l’expérimentation, menée par VNF à Wambrechies, d’une plateforme de dépotage susceptible de prendre en charge d’importantes quantités de sédiments et de répondre ainsi aux besoins liés au projet de canal Seine-Nord. Il serait inconcevable de voir ces sédiments finir sur des sites de dépôt avant d’être exportés vers la Belgique ou les Pays-Bas, où l’on peut plus facilement les réutiliser.

Ne serait-il pas possible d’étendre le périmètre de l’arrêté du 4 juin 2021 fixant les critères de sortie du statut de déchet pour les terres excavées et sédiments ayant fait l’objet d’une préparation en vue d’une utilisation en génie civil ou en aménagement (voir Journ’eau no 1249), afin de permettre la réutilisation des sédiments en tant que matériau de construction ou pour un usage agricole, eu égard aux propriétés fertilisantes de certains sédiments ?

Réponse de la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité :

Chaque année, l’entretien des voies de navigation et des ports génère en France 50 millions de mètres cubes de sédiments. En parallèle, le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) français utilise 400 millions de tonnes par an de granulats extraits du sol.

Le 25 janvier dernier, ma collègue Bérangère Couillard, secrétaire d’État chargée de l’écologie, a arrêté une feuille de route avec VNF et les acteurs économiques de la région des Hauts-de-France pour enclencher une dynamique d’économie circulaire vertueuse en matière de valorisation de ces sédiments. Cette feuille de route est le résultat de travaux expérimentaux menés dans cette région pionnière avec le concours des acteurs économiques du BTP et de l’École nationale supérieure des techniques industrielles et des mines de Douai, et avec l’accompagnement de la région ainsi que du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Recycler les sédiments dans le béton

Grâce à cette démarche d’économie circulaire territoriale, les sédiments pourront être recyclés dans le béton et d’autres produits du BTP. À l’échelle de cette région, quelque 300 000 tonnes de sédiments par an pourront ainsi être recyclées au lieu d’être mises en décharge, ce qui permettra de dégager des gains d’un montant de 15 M par an et de créer 400 emplois.

D’autres voies de valorisation des sédiments sont envisageables, notamment leur utilisation comme fertilisants et supports de culture, sous réserve qu’ils ne soient pas pollués. Le ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire prépare un décret d’application de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, qui établira prochainement un socle commun de critères pour les matières fertilisantes et les supports de culture.

Sénat, 4 juill. 2023.

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