C’est le préfet qui décide si l’eau et l’assainissement sont prioritaires en matière d’alimentation électrique

En discutant avec les gestionnaires de ces services, les préfets leur permettent de concentrer leurs groupes électrogènes dans les sites les plus à risque.

Question de Florence Blatrix Contat, sénatrice (SER) de l’Ain :

Le spectre des coupures électriques semble s’éloigner, mais notre réseau électrique demeure fragile, avec de nombreuses centrales de production électrique mises à l’arrêt pour une longue période. Les risques de délestages pour l’hiver suivant ne sont donc pas à écarter.

Aussi les élus locaux demeurent-ils très vigilants et inquiets. Leurs associations, notamment l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalités, ainsi que la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies, vous alertent depuis des mois sur la situation des usines d’assainissement des eaux usées et de traitement de l’eau potable. Des coupures d’électricité sur ces sites pourraient avoir des conséquences majeures pour les habitants : coupures d’eau dans les hôpitaux, bornes d’incendie inutilisables ou encore pollution des milieux naturels.

En effet, concernant l’eau potable, même si les réservoirs sont le plus souvent rechargés la nuit, des coupures d’électricité feraient peser des risques sur les installations de rechloration installées au fil des réseaux, qui sont indispensables pour assurer la potabilité de l’eau. Concernant l’assainissement, les risques de pollution en cas de coupure d’électricité sont bien réels dans les usines d’assainissement, mais aussi dans les postes de refoulement, avec des risques de déversement d’eaux usées non traitées dans les milieux naturels.

Avec des délais de prévenance courts, il est par ailleurs difficile d’imaginer des groupes électrogènes spécifiques et indépendants pour chacune de ces installations. Aussi, j’insiste de nouveau pour que ces installations indispensables soient classées en installations prioritaires. Dans le cas contraire, comment l’État, par l’intermédiaire de ses services déconcentrés, accompagnera-t-il les collectivités responsables de l’eau potable et de l’assainissement dans la préparation de ces délestages ? Enfin, comment se répartiront les responsabilités en cas de pollution liée à un délestage ?

Réponse de la secrétaire d’État chargée de l’écologie :

Notre pays traverse sa plus grave crise énergétique depuis les chocs pétroliers des années 1970. Depuis l’été dernier, nous avons pris toutes les dispositions nécessaires pour passer l’hiver dans les meilleures conditions. Cela passe notamment par la maximisation des moyens de production, la sécurisation de nos importations et, tout particulièrement, l’accélération des projets d’énergie renouvelable et la réduction de notre consommation d’électricité. Nous souhaitons d’ailleurs remercier les Français pour leur mobilisation : grâce à leur sobriété, notre système électrique a pu passer l’hiver tout en maintenant un signal Écowatt vert.

Nous devons toutefois continuer à nous préparer à des scénarios extrêmes dans lesquels des délestages pourraient s’avérer nécessaires. La réglementation prévoit que les installations prioritaires, dans la limite d’un plafond de consommation total au niveau départemental, sont inscrites sur des listes afin de ne pas voir leur alimentation coupée, la priorité absolue étant d’éviter les menaces immédiates envers la vie d’une personne.

Des services absents de la liste nationale des usagers prioritaires

Les installations d’eau potable et d’assainissement ne sont pas explicitement prévues par l’arrêté du 5 juillet 1990 encadrant ces listes d’usagers dits « prioritaires ». Pour autant, cela ne signifie pas qu’elles ne sont pas prises en compte dans l’exercice de priorisation réalisé à l’échelon local par les préfets. La situation dépend de chaque territoire : le préfet de département peut compléter la liste nationale en y ajoutant une installation déterminée, en fonction de son importance et des circonstances particulières à ce territoire.

Le Gouvernement et les préfets ont conduit un travail avec les gestionnaires du réseau électrique et plusieurs filières, notamment celle de l’eau et de l’assainissement, afin d’examiner les situations particulières et de permettre à ces acteurs de se préparer au mieux au risque de coupures. En l’occurrence, il s’agit pour les gestionnaires d’identifier les sites les plus à risque et d’y concentrer leurs moyens de sécurisation.

JO Sénat CR, 13 janv. 2023, p. 149.

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