o Comment la Commission examinera les aides d’État en matière d’environnement

Ces aides seront autorisées quand elles visent à remédier aux carences des lois du marché dans ce domaine, notamment pour prévenir et réduire les pollutions.

Puisque l’Union européenne veut atteindre la neutralité carbone en 2050, et atteindre en même temps les autres objectifs du pacte vert pour l’Europe, la Commission estime qu’il faudra investir, entre 2021 et 2030, non pas 130 Md comme prévu initialement, mais quatre fois plus, soit 520 Md, dont le quart pour ces autres objectifs.

La politique de la concurrence, et plus particulièrement les règles relatives aux aides d’État, ont un rôle crucial à jouer pour permettre à l’Union d’atteindre ses objectifs stratégiques inscrits du pacte vert et pour l’appuyer dans cette mission.

La communication sur le pacte vert pour l’Europe prévoit expressément que les règles relatives aux aides d’État seront révisées afin de tenir compte de ces objectifs stratégiques, de contribuer d’une manière équitable et efficace sur le plan économique à la transition vers la neutralité climatique, et de faciliter la suppression progressive des combustibles fossiles, tout en garantissant des conditions de concurrence égales dans le marché intérieur. Les présentes lignes directrices reflètent cette révision.

Compatibilité des aides en matière de protection de l’environnement

Le principe d’interdiction des aides d’État reste en vigueur, et les États membres doivent continuer à notifier les aides d’État qu’ils envisagent, mais ils en sont dispensés pour les mesures qui remplissent les conditions énoncées dans un règlement d’exemption par catégorie adopté par la Commission.

Les présentes lignes directrices fournissent des orientations sur la manière dont la Commission appréciera désormais la compatibilité des mesures en matière de protection de l’environnement, y compris de protection du climat, et en matière d’énergie qui sont soumises à l’obligation de notification.

Les aides doivent respecter le droit de l’environnement de l’UE

Des aides d’État sont possibles quand elles facilitent le développement d’une activité économique, notamment en matière d’environnement. Toutefois, les autorités des États membres devraient alors veiller à ce que la mesure d’aide, les modalités dont elle est assortie, les modalités d’adoption et l’activité qui en bénéficie n’enfreignent pas le droit de l’Union en matière d’environnement.

Elles devraient également veiller à ce que le public concerné puisse être consulté dans le cadre du processus décisionnel sur les aides. Enfin, les particuliers et les organisations devraient avoir la possibilité de contester une aide ou les mesures mettant en œuvre une aide devant les juridictions nationales lorsqu’ils peuvent démontrer que le droit environnemental de l’Union n’est pas respecté.

Les présentes lignes directrices s’appliquent aux aides d’État octroyées dans le but de faciliter le développement d’activités économiques d’une manière qui améliore la protection de l’environnement.

Elles ne s’appliquent pas aux aides d’État à la conception et à la fabrication de produits, de machines, d’équipements ou de moyens de transport respectueux de l’environnement en vue d’exercer des activités en utilisant moins de ressources naturelles, ni aux mesures prises à l’intérieur d’usines ou d’autres installations de production en vue d’améliorer la sécurité ou l’hygiène. Elles ne s’appliquent pas non plus aux aides d’État à la recherche, au développement et à l’innovation. Les aides à la protection de l’environnement et à l’énergie ne doivent pas être octroyées à des entreprises en difficulté.

Prévention et réduction de la pollution

La Commission a répertorié une série de catégories de mesures dans le domaine de la protection de l’environnement et de l’énergie pour lesquelles des aides d’État peuvent être compatibles avec le marché intérieur. Ce sont notamment les aides à l’utilisation efficace des ressources et au soutien à la transition vers une économie circulaire, les aides à la prévention ou à la réduction de la pollution, les aides en faveur de la réparation des dommages environnementaux, de la réhabilitation des habitats naturels et des écosystèmes, de la protection ou de la restauration de la biodiversité et de la mise en œuvre de solutions fondées sur la nature pour l’adaptation au changement climatique et l’atténuation de ses effets, et les aides aux études ou aux services de conseil relatifs aux questions de climat, de protection de l’environnement et d’énergie.

Lorsqu’ils notifient une aide, les États membres doivent inventorier les activités économiques qui seront facilitées et comment le développement de ces activités est favorisé. Une aide visant à empêcher ou à réduire les effets négatifs des activités économiques sur le climat ou l’environnement peut faciliter le développement d’activités économiques en augmentant la durabilité de l’activité économique concernée. Elle peut également permettre de poursuivre l’activité à l’avenir sans causer de dommages environnementaux disproportionnés et en soutenant la création de nouvelles activités et de nouveaux services économiques.

Contribuer à la politique de l’environnement

Les États membres doivent également déterminer si et comment l’aide contribuera à la réalisation des objectifs de la politique de l’Union en matière climatique, environnementale et énergétique et, de manière plus spécifique, aux bénéfices attendus de l’aide pour ce qui est de sa contribution substantielle à la protection de l’environnement.

Une aide ne peut être considérée comme facilitant une activité économique que si elle a un effet incitatif. Il y a effet incitatif lorsque l’aide incite le bénéficiaire à modifier son comportement, à exercer une activité économique supplémentaire ou une activité économique plus respectueuse de l’environnement, qu’il n’exercerait pas sans l’aide ou qu’il exercerait d’une manière restreinte ou différente. L’aide ne doit pas servir à soutenir les coûts d’une activité que son bénéficiaire aurait de toute façon réalisée, ni à compenser le risque commercial normal inhérent à une activité économique.

La Commission considère que l’aide est dépourvue d’effet incitatif pour son bénéficiaire dans les cas où ce dernier a adressé sa demande d’aide aux autorités nationales après le début des travaux liés au projet ou à l’activité. Dans de tels cas, lorsque le bénéficiaire commence à mettre en œuvre un projet avant d’introduire sa demande d’aide, toute aide octroyée en faveur de ce projet ne sera pas considérée en principe comme compatible avec le marché intérieur.

Des exceptions sont toutefois prévues, notamment quand les autorités nationales ont publié, avant le début des travaux, un avis annonçant leur intention d’établir la mesure d’aide envisagée, ou quand des aides au fonctionnement sont octroyées en faveur d’une production respectueuse de l’environnement à des installations existantes pour lesquelles il n’existe pas de début des travaux, compte tenu de l’absence d’un nouvel investissement significatif.

Dans ces cas, l’effet incitatif peut être démontré par une modification visant à exploiter l’installation d’une manière respectueuse de l’environnement plutôt que par un autre mode d’exploitation moins onéreux et moins respectueux de l’environnement.

Quand le coût de la pollution n’est pas évalué

La mesure d’aide d’État proposée doit cibler une situation où elle peut apporter un développement significatif que le marché est incapable d’apporter à lui seul, par exemple en corrigeant des défaillances du marché liées aux projets ou activités pour lesquels l’aide est octroyée. De telles défaillances sont constatées par exemple lorsque le coût de la pollution n’est pas correctement évalué ni mis entièrement à la charge de l’entreprise.

La Commission estimera qu’une aide est nécessaire si l’État membre démontre qu’elle cible effectivement les défaillances résiduelles du marché, en tenant compte également de toute autre politique et mesure déjà en place pour remédier à certaines des défaillances du marché constatées. La mesure d’aide proposée doit constituer un instrument d’intervention approprié pour atteindre l’objectif visé par l’aide, à savoir qu’il ne peut exister d’instrument d’intervention ni d’autres types d’aide entraînant moins de distorsions de concurrence et susceptibles d’atteindre les mêmes résultats.

L’aide sera considérée comme proportionnée si son montant par bénéficiaire se limite au minimum nécessaire pour mener le projet ou l’activité bénéficiant de l’aide, c’est-à-dire en général le surcoût net nécessaire pour atteindre son objectif.

Afin de réduire les effets négatifs en veillant à ce que les concurrents aient accès aux informations pertinentes sur les activités bénéficiant d’un soutien, l’État membre concerné doit veiller à ce que certaines informations soient publiées sur la plateforme Transparency award module de la Commission ou sur un site internet exhaustif consacré aux aides d’État, au niveau national ou au niveau régional, notamment pour toute aide supérieure à 100 000 . Le grand public doit avoir accès au site sans restriction. Aucune inscription préalable ne doit être nécessaire pour y accéder.

Remédier à une défaillance du marché

Les aides à finalité environnementale tendront à favoriser les technologies et les produits respectueux de l’environnement au détriment d’autres technologies et produits plus polluants, et cet effet de l’aide ne sera en principe pas considéré comme une distorsion injustifiée de la concurrence, dès lors qu’il remédie à une défaillance du marché qui rend l’aide nécessaire. Pour les mesures en faveur de la protection de l’environnement, la Commission examinera donc les effets de distorsion sur les concurrents qui exercent aussi leurs activités en respectant l’environnement, même en l’absence d’aide.

La Commission considère que les régimes ouverts à un éventail plus large de bénéficiaires potentiels ont ou sont susceptibles d’avoir un effet de distorsion de la concurrence plus limité que les aides ne ciblant qu’un nombre limité de bénéficiaires spécifiques, en particulier lorsque le champ d’application de la mesure d’aide inclut tous les concurrents désireux de fournir le même service, produit ou avantage. Elle autorisera des mesures au titre des présentes lignes directrices pour une durée maximale de dix ans ; au-delà, l’État membre pourra toujours renotifier une mesure, s’il estime nécessaire d’en prolonger l’application.

La Commission s’assurera que l’aide ne provoque pas d’effets manifestement négatifs sur la concurrence et les échanges. Par exemple, les aides octroyées pour la réalisation d’objectifs environnementaux et énergétiques qui se limitent à entraîner un déplacement de l’activité économique, sans améliorer le niveau existant de protection de l’environnement dans les États membres, ne seront pas considérées comme compatibles avec le marché intérieur.

La Commission considérera qu’une mesure d’aide est compatible avec le marché intérieur uniquement lorsque les effets positifs l’emportent sur les effets négatifs. Dans les cas où la mesure d’aide proposée ne remédie pas de manière appropriée et proportionnée à une défaillance du marché bien identifiée, par exemple en raison du caractère transitoire de l’avantage et des distorsions à long terme qu’elle entraîne, les effets de distorsion négatifs sur la concurrence auront tendance à l’emporter sur les effets positifs de la mesure. Il est donc probable que la Commission conclura que la mesure d’aide proposée est incompatible.

Récupération des eaux de pluie

Parmi les différents domaines qui pourront être vus d’un bon œil par la Commission, on trouve les aides à l’amélioration de la performance énergétique et environnementale des bâtiments. Elles pourront être combinées avec des aides en faveur des équipements de récupération des eaux de pluie, dans les bâtiments neufs ou en rénovation.

Des aides d’État pourront aussi être jugées compatibles quand elles contribueront à la prévention ou à la réduction de la pollution, notamment pour atteindre les objectifs fixés par l’Union européenne en matière de qualité des masses d’eau et de réduction des excédents de nutriments, d’engrais et de pesticides dangereux. Ces aides devront permettre à des entreprises d’aller au-delà des normes de protection de l’environnement de l’Union, d’augmenter le niveau de protection de l’environnement en l’absence de normes de l’Union ou de se conformer à des normes adoptées par l’Union, mais pas encore entrées en vigueur.

Aboutir à une réduction globale de la pollution

L’aide doit viser à prévenir ou à réduire la pollution directement liée aux activités propres du bénéficiaire. Elle ne peut pas se limiter à déplacer la pollution d’un secteur ou d’un compartiment environnemental vers un autre, par exemple de l’air vers l’eau. Lorsqu’elle vise à réduire la pollution, elle doit aboutir à une réduction globale de la pollution.

Les coûts admissibles correspondent aux coûts d’investissement supplémentaires directement liés à la réalisation d’un niveau plus élevé de protection de l’environnement. L’intensité de l’aide ne doit pas excéder 40 % des coûts admissibles, 50 % pour les moyennes entreprises, 60 % pour les petites entreprises. Elle peut être majorée de dix points de pourcentage pour les activités d’innovation écologique.

D’autres aides d’État pourront être acceptées par la Commission quand elles viseront à appliquer la stratégie de l’Union européenne en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030 et qu’elles contribueront à la protection et à la restauration de la biodiversité et des écosystèmes, en particulier par des incitations à réparer les dommages causés aux sites contaminés, à réhabiliter les habitats naturels et les écosystèmes dégradés ou à entreprendre des investissements pour la protection des écosystèmes. Cela ne concernera pas les aides destinées à remédier aux dommages causés par des calamités naturelles, telles que des inondations.

Les actions pouvant être aidées à ce titre sont la réparation des dommages environnementaux, y compris les dommages causés à la qualité du sol et des eaux de surface ou souterraines ou au milieu marin, et la réhabilitation d’habitats naturels et d’écosystèmes en état de dégradation, la protection ou la restauration de la biodiversité ou des écosystèmes, et l’emploi de solutions fondées sur la nature pour l’adaptation au changement climatique et l’atténuation de ses effets.

Ces aides ne sont toutefois acceptables que lorsque l’entité ou l’entreprise à l’origine des dommages environnementaux ne peut être identifiée ou tenue légalement responsable du financement des travaux nécessaires pour prévenir les dommages environnementaux et y remédier en vertu du principe du pollueur-payeur. L’État membre doit donc démontrer que toutes les mesures nécessaires, y compris des actions en justice, ont été prises pour identifier l’entité ou l’entreprise responsable à l’origine du dommage environnemental et lui faire supporter les coûts y afférents.

Aide pour la réparation des dommages environnementaux

Lorsque l’entité ou l’entreprise responsable ne peut pas être identifiée ou astreinte à supporter les coûts, une aide peut être accordée pour l’ensemble des travaux de réparation ou de réhabilitation et elle peut être considérée comme ayant un effet incitatif.

La Commission peut considérer qu’une entreprise ne peut être astreinte à supporter les coûts liés à la réparation de dommages environnementaux qu’elle a causés si ladite entreprise a cessé d’exister au regard du droit et si aucune autre entreprise ne peut être considérée comme son successeur légal ou économique, ou s’il n’y a pas de garantie financière suffisante pour faire face aux frais de la réparation.

Les aides à la réparation des dommages environnementaux et à la réhabilitation d’habitats naturels et d’écosystèmes seront considérées comme ayant un effet incitatif lorsque les coûts de la réparation ou de la réhabilitation dépassent l’accroissement de la valeur du terrain.

Pour les investissements dans la réparation des dommages environnementaux ou la réhabilitation d’habitats naturels et d’écosystèmes, les coûts admissibles sont les coûts supportés pour les travaux de réparation ou de réhabilitation, déduction faite de l’augmentation de la valeur du terrain ou de la propriété. L’accroissement de la valeur du terrain ou du bien résultant de la réparation ou de la réhabilitation doit être évalué par un expert qualifié indépendant. L’aide peut atteindre 100 % des coûts admissibles.

Restauration de la biodiversité et solutions fondées sur la nature

Pour les investissements dans la protection ou la restauration de la biodiversité et dans la mise en œuvre de solutions fondées sur la nature pour l’adaptation au changement climatique et l’atténuation de ses effets, les coûts admissibles sont les coûts totaux des travaux qui contribuent à la protection ou à la restauration de la biodiversité ou à la mise en œuvre de ces solutions fondées sur la nature. L’aide peut également atteindre 100 % des coûts admissibles.

Enfin, des aides d’État pourront être accordées pour les études ou les services de conseil directement liés à des projets ou activités couverts par les présentes lignes directrices, même s’ils ne sont pas suivis d’un investissement couvert par les présentes lignes directrices.

Ces études ou ces services de conseil ne doivent pas être une activité continue ou périodique et ne doivent pas être liés aux frais de fonctionnement habituels de l’entreprise. Le taux de l’aide ne doit pas dépasser 60 % des coûts admissibles, 70 % quand le client est une entreprise moyenne, 80 % quand c’est une petite entreprise.

Communication de la Commission : lignes directrices concernant les aides d’État au climat, à la protection de l’environnement et à l’énergie pour 2022 (JOUE C 80, 18 févr. 2022, p. 1).

Retour