Réforme des redevances : l’exposé des motifs

Après un débat tronqué à l’Assemblée nationale, cet article du projet de loi de finances devrait déchaîner les passions au Sénat. Voici comment le Gouvernement le résume.

En raison de l’absence de majorité absolue à l’Assemblée nationale, les députés n’ont pas débattu en séance publique de la réforme des redevances des agences de l’eau, prévue par l’article 16 du projet de loi de finances pour 2024. Quant à la commission des finances, obligée d’examiner près de 3 000 amendements en quatre jours, elle a expédié très rapidement les douze proposés sur cet article, sans que cet embryon de discussion n’apporte aucune information nouvelle. Douze amendements sur 3 000 : il est clair que ce sujet n’intéresse pas les députés.

Avec ou sans amendements du Sénat ?

Le texte de l’article 16 transmis au Sénat est donc celui qui a été rédigé par Bercy. Il est trop tôt pour l’analyser en détail, car on ne peut pas exclure la prise en compte d’amendements sénatoriaux. Nous suivrons l’évolution de cet article et nous en analyserons le texte définitif. En revanche, ce qui ne changera pas, même si l’article est amendé, c’est l’exposé des motifs qui l’accompagne. Nous le reprenons ici, moyennant quelques corrections de détail et l’ajout de quelques intertitres.

« Dans le prolongement du plan Eau annoncé par le Président de la République le 30 mars 2023, le présent article a pour objet d’adapter, à compter du 1er janvier 2025, la fiscalité aux enjeux environnementaux relatifs à la pollution et à la raréfaction de la ressource en eau. Il vise ainsi à renforcer les principes de pollueur-payeur et préleveur-payeur, tout en rééquilibrant la charge fiscale sur l’eau pesant sur les différentes catégories de redevables.

Augmenter les ressources des agences de l’eau

« La réforme proposée, qui s’appuie sur les travaux des Assises de l’eau de 2019 et du Varenne agricole de 2021, permettra d’augmenter les ressources des agences de l’eau et d’assurer le financement des mesures du plan Eau.

« À cette fin, quatre évolutions sont proposées par le présent article.

« En premier lieu, il prévoit, en substitution [aux] actuelles redevances pour pollution d’origine domestique et pour modernisation des réseaux de collecte, la création d’une redevance sur la consommation d’eau potable et de deux redevances pour la performance des réseaux d’eau potable et des systèmes d’assainissement collectif. La nouvelle redevance sur la consommation d’eau potable permettra d’accentuer le signal-prix associé à la consommation d’eau potable. Elle sera due par chaque usager final du service d’eau potable, sans distinguer entre consommation domestique et consommation industrielle. Les redevances pour la performance des réseaux d’eau potable et des systèmes d’assainissement collectif, en incitant à rendre les services publics d’eau et d’assainissement plus performants, poursuivent une finalité environnementale. Elles seront dues par les communes ou leurs groupements.

Redevance alourdie sur les pesticides les plus nocifs

« En deuxième lieu, il renforce la redevance pour pollutions diffuses qui porte sur les produits phytopharmaceutiques, en relevant le tarif associé aux substances les plus nocives pour la santé et l’environnement. Ces évolutions sont de nature à favoriser le développement de pratiques culturales plus favorables d’un point de vue environnemental et sanitaire.

« En troisième lieu, il permet une meilleure articulation de la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau avec le principe du préleveur-payeur. Le relèvement des tarifs plafonds, combiné [avec] l’introduction de seuils minimum pour fixer les tarifs d’imposition, permettra de renforcer le signal-prix associé à la raréfaction de l’eau. Il incitera également au comptage réel des volumes prélevés, traduisant ainsi l’objectif du plan Eau de mieux piloter la ressource.

Indexation des redevances sur l’inflation

« En dernier lieu, il prévoit que les tarifs ou l’encadrement tarifaire prévus pour le calcul de chacune des redevances des agences de l’eau [seront] indexés chaque année sur l’inflation. »

NDLR : la redevance sur la consommation d’eau potable relèvera des taxes automatiques, comme la TVA, et l’usager ne pourra éventuellement en réduire le fardeau qu’en diminuant sa consommation d’eau potable. En revanche, la redevance pour la performance des réseaux d’eau potable sera calculée en fonction du taux de fuite, tandis que la redevance pour la performance des systèmes d’assainissement collectif dépendra de la qualité des rejets. Cette dernière remplacera en outre la prime pour épuration, du moins en ce qui concerne son effet incitatif. Toutes deux seront payées par les autorités organisatrices ou peut-être par les exploitants, et on ne sait pas encore si elles pourront être répercutées sur les factures des abonnés : ce seront sans doute deux des points qui seront les plus âprement discutés au Sénat.

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