Certaines agences de l’eau attribuent encore des aides à l’ANC

L’assainissement non collectif a été le grand perdant des arbitrages de 2018.

Question de Nadia Sollogoub, sénatrice (UC) de la Nièvre :

Pour leurs onzièmes programmes d’intervention, les agences de l’eau doivent faire face à de nouvelles missions, alors que leurs budgets sont en diminution. En conséquence, l’agence de l’eau Seine-Normandie a modifié les critères d’éligibilité aux aides à l’assainissement non collectif (ANC). De ce fait, certaines communes ne sont plus éligibles à ces dispositifs, alors que beaucoup d’habitants en auraient grand besoin.

Cette décision intervient au moment où les élus avaient réussi à convaincre les habitants concernés de faire procéder aux études préalables à la mise aux normes des installations et, surtout, après qu’ils leur avaient indiqué que ces travaux seraient subventionnés.

Je vais prendre l’exemple du village de Neuffontaines, dans mon département : la maire a fait un tel effort de pédagogie auprès des 104 habitants de sa commune que 50 d’entre eux se sont lancés dans une démarche pour équiper leur habitation d’un dispositif d’ANC. Ils ont mené des études, subventionnées à hauteur de 60 % par l’agence de l’eau, qui ont prouvé qu’il existait une pollution avérée du cours d’eau liée à leurs installations actuelles. On leur a donc promis des aides.

Plus assez de pollution pour financer les travaux ?

Or les critères d’éligibilité ont changé, et Neuffontaines n’est plus éligible à ces aides. Certaines communes voisines le sont restées, ce qui est très difficile à comprendre. Le dossier était en cours d’instruction depuis 2015, et ce changement est totalement illogique et incompréhensible pour les habitants qui souhaitaient pourtant investir dans une démarche vertueuse. Voici la conclusion d’un habitant : il y avait assez de pollution pour déclencher les études, mais plus assez pour financer les travaux.

Si l’instruction de certains dossiers a réellement été bouleversée par le changement des critères techniques et administratifs, il faut absolument la relancer, parce que c’est la parole des élus qui est en jeu, de même que la crédibilité de l’État. Comptez-vous prendre des mesures pour que ce changement d’orientation ne soit pas perçu comme une promesse non tenue et ne vienne pas annihiler des années de travail et de mobilisation des élus ?

Réponse du secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, au nom de la ministre de la transition écologique et solidaire :

Les onzièmes programmes d’intervention des agences de l’eau, pour la période 2019-2024, répondent à deux priorités du gouvernement : un recentrage des interventions dans une logique de solidarité territoriale, et la poursuite et le renforcement des interventions en faveur de la préservation des milieux aquatiques, de la biodiversité et des milieux marins.

La question des aides à l’ANC a été largement débattue lors de l’élaboration de ces programmes. Dans un contexte de restriction des moyens humains et budgétaires des agences de l’eau, et afin de favoriser les interventions qui concourent efficacement à la reconquête de la qualité des masses d’eau et de la biodiversité qui y est associée, l’ANC n’a pas été retenu parmi les priorités ministérielles.

Suppression ou limitation des aides à l’ANC

Certains comités de bassin ont ainsi fait le choix d’arrêter le versement des aides correspondantes. D’autres, dont Seine-Normandie, ont limité ces aides aux territoires dans lesquels elles sont nécessaires pour assurer le bon état des masses d’eau ou relèvent d’une priorité d’ordre sanitaire. Ces solutions, qui résultent des échanges qui se sont tenus au sein des comités de bassin, nous apparaissent comme un compromis pragmatique.

Pour ce bassin, les zones éligibles aux aides à l’ANC sont dorénavant le littoral, qui est une zone d’influence microbienne, les territoires fragiles des têtes de bassin, ainsi que les territoires pouvant encore avoir un impact bactériologique sur des zones de baignade. Plus précisément, quatre communes du territoire dont vous avez parlé restent éligibles à ces aides. La prochaine commission des aides de l’agence de l’eau, qui se réunira en juin, va d’ailleurs examiner le dossier d’attribution d’une aide d’environ 350 000 , pour la réhabilitation de 58 installations d’ANC dans la commune de Chevannes-Changy, qui fait partie de la communauté de communes Tannay-Brinon-Corbigny, comme Neuffontaines.

Par ailleurs, les propriétaires qui font procéder aux travaux de réalisation ou de réhabilitation de leurs dispositifs peuvent toujours bénéficier d’autres aides : les prêts de la caisse d’allocations familiales ou d’une caisse de retraite, les aides de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), les subventions des conseils départementaux et l’éco-prêt à taux zéro.

JO Sénat CR, 27 mai 2020, p. 4384

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