Le chantier de la déviation du Taillan-Médoc respecte le droit en vigueur

Cela n’a pas empêché une partie du sol de s’effondrer au-dessus d’un champ captant, l’hiver dernier.

Question de Monique de Marco, sénatrice (Gest) de la Gironde :

Le chantier de la déviation du Taillan-Médoc, dans mon département, risque de polluer l’eau. Cet ouvrage a été décidé voici vingt ans par le conseil départemental pour éviter à cette commune le passage quotidien d’un millier de poids lourds. Or le tracé retenu coupe en deux les derniers espaces boisés de la métropole bordelaise, qui abritent une zone extrêmement riche en biodiversité. La compensation prévue n’est pas suffisante, et elle ne respecte pas l’obligation prioritaire d’éviter ces destructions, comme l’impose la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.

La future déviation traversera surtout un champ captant, qui alimente dans une proportion importante l’agglomération bordelaise en eau potable. Cette nappe, extrêmement vulnérable, a été victime à trois reprises de pollutions, entraînant des arrêts de l’exploitation du captage. Dernièrement, un effondrement du sol de cinq mètres de diamètre et de cinq mètres de profondeur a mis en exergue les risques d’accident de chantier et de grave pollution du champ captant. En urgence, il a fallu renforcer la sécurité par de nouveaux équipements et décider des études complémentaires.

Un défaut d’anticipation des risques a été ainsi mis en évidence. Dans l’attente du résultat des nouvelles études géophysiques destinées à vérifier la présence d’éléments pouvant occasionner un nouvel effondrement, je vous demande de suspendre ce chantier par mesure de précaution.

Réponse de la ministre déléguée chargée du logement, au nom du ministre délégué chargé des transports :

Un référé visant à suspendre les travaux a été déposé en février 2020 devant le tribunal administratif de Bordeaux par une association et des riverains. Déboutés, ceux-ci se sont ensuite pourvus en cassation. Le Conseil d’État a considéré qu’il n’y avait pas lieu de suspendre les travaux.

Je rappelle par ailleurs que l’autorisation de début de travaux de cette déviation a été accordée après l’obtention des autorisations administratives au titre du code de l’environnement sur les volets « loi sur l’eau » et « espèces protégées ». Ces autorisations tiennent bien compte du champ captant et des périmètres rapproché et éloigné de protection. Dans le cadre de l’instruction du dossier déposé par le conseil départemental, l’agence régionale de santé (ARS) et l’hydrogéologue agréé ont été associés ; leurs préconisations ont été reprises dans les arrêtés autorisant les travaux.

Le premier arrêté préfectoral « loi sur l’eau » concernant la déviation du Taillan-Médoc a été signé le 19 mars 2012. Il a été modifié par un autre arrêté du 15 mars 2016, et sa partie relative aux espèces protégées a été complétée le 13 septembre 2019. Des contrôles du chantier par les services compétents sont réalisés régulièrement pour s’assurer de la bonne prise en compte de leurs prescriptions par le conseil départemental.

S’agissant des mesures d’évitement, de réduction et de compensation des impacts sur la biodiversité, il ressort de l’instruction du dossier et de la décision du Conseil d’État du 17 décembre dernier que le projet d’aménagement routier a été précédé de l’examen approfondi de tracés alternatifs, dont aucun n’apparaît plus favorable en matière d’atteinte aux espèces protégées.

Un avis favorable… sous réserve de mesures supplémentaires

Ce projet comporte des mesures d’évitement, de réduction et de compensation nombreuses et étayées permettant de limiter les atteintes occasionnées aux espèces animales et végétales protégées. Ces mesures ont conduit le Conseil national de la protection de la nature (CNPN), à la suite des modifications apportées au projet après les avis négatifs qu’il avait initialement émis, à rendre un avis favorable, le 23 mai 2019, sous réserve de mesures de compensation.

Vous soulevez aussi les risques d’accident de chantier et de pollution de l’eau. Je rappelle que l’effondrement d’une partie du sol en février dernier s’est accompagné de la mise en place d’un protocole spécifique de protection pour sécuriser le chantier et protéger la ressource.

Réplique de Monique de Marco :

Tout cela remonte à vingt ans ! Aujourd’hui, nous sommes dans une démarche devant aboutir à une grande loi sur le climat, que j’espère ambitieuse. Pour nous, ce projet de déviation n’a plus lieu d’être. En effet, il aura des conséquences irrémédiables sur la biodiversité de la Gironde. Il comporte également des risques de pollution de l’eau, que vous avez soulignés, et qui seront toujours présents, la nappe ayant une très faible profondeur à cet endroit.

JO Sénat CR, 4 juin 2021, p. 4548.

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