L’eau dans la loi de finances pour 2024

Au menu : la réforme des redevances des agences de l’eau, la décarbonation du transport fluvial, l’impact environnemental des budgets locaux, les inondations, la sécheresse à Mayotte, etc.

Outre la réforme des redevances des agences de l’eau, qui figure dans son article 101, la loi de finances pour 2024 comporte plusieurs mesures qui affectent le domaine de l’eau :

• Art. 42 : Ajustement de l’incitation à la décarbonation des bateaux de transport, tel que prévue par l’article 39 decies C du code général des impôts. Sa nouvelle version s’applique pour toute l’année 2024, mais les bateaux et les travaux déjà commandés avant cette date bénéficient du régime antérieur, plus intéressant, s’ils sont livrés ou achevés avant 2025.

Selon les nouvelles règles, les entreprises de transport fluvial de marchandises ou de passagers peuvent déduire de leur résultat imposable 75 % des surcoûts entraînés par l’installation d’équipements permettant l’utilisation d’une énergie décarbonée comme énergie propulsive principale, directement ou par transformation en énergie électrique ; ce pourcentage est porté à 115 % quand la propulsion est assurée à titre exclusif par ces énergies. Dans certains cas, elles peuvent déduire de même 50 % des surcoûts quand l’énergie propulsive principale repose sur le méthanol, l’éthanol ou le diméthyl éther, et 75 % quand ces carburants proviennent de sources renouvelables.

Dans d’autres cas, elles peuvent déduire 40 % pour des équipements destinés à compléter la propulsion principale par une propulsion décarbonée, et 20 % quand des équipements permettent une alimentation électrique en escale à partir du réseau terrestre ou d’un moteur auxiliaire utilisant une énergie décarbonée. Sauf pour remplacer la propulsion principale, ces déductions sont plafonnées. Elles s’appliquent dans les mêmes conditions aux entreprises qui louent un bateau dans le cadre d’un contrat de crédit-bail ou de location avec option d’achat conclu en 2024.

• Art. 76 : L’aide instituée par le décret no 2023-982 du 25 octobre 2023 portant création d’une aide pour les entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques résultant de la situation hydrique de Mayotte et des mesures de restriction d’usage de l’eau prises pour y remédier, dans sa rédaction en vigueur le 23 novembre 2023, est exonérée d’impôt sur les sociétés et d’impôt sur le revenu ainsi que de toutes les cotisations ou contributions sociales d’origine légale ou conventionnelle.

De même, cette aide n’est pas prise en compte pour l’appréciation des limites et des seuils prévus par certains articles du code général des impôts. En revanche, cette exonération ne s’applique que dans le cadre des règlements (UE) nos 1407/2013, 1408/2013 et 717/2014 de la Commission concernant les aides de minimis.

• Art. 156 : Parmi les impositions de toutes natures affectées à certains opérateurs de l’État, on en notera quatre au profit de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), pour un total de 3 647 150 000 , neuf au profit des agences de l’eau, pour un total de 2 347 620 000  (NDLR : la réforme des redevances ne s’applique pas encore en 2024), quatre au profit de l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), pour un total de 21 179 000 , une au profit du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres, pour un total de 40 M, une au profit de la filière de responsabilité élargie du producteur (REP) relative aux navires de plaisance et de sport hors d’usage, pour un total de 0,9 M, trois au profit de l’Office français de la biodiversité, pour un total de 1,5 M, et une au profit de Voies navigables de France, pour un total de 136,5 M. Tous ces montants sont prévisionnels.

Toutefois, certaines de ces affectations sont plafonnées à un niveau inférieur : 3 462 817 000  pour l’Afitf. Pour les agences de l’eau, le Conservatoire du littoral et Voies navigables de France, le plafond est égal au rendement prévisionnel des impositions affectées. Pour l’Anses, ce plafond est fixé à 27,7 M.

• Art. 167 : Pour 2024, la mission Écologie, développement et mobilité durables dispose d’environ 24,1 Md en autorisations d’engagement (AE) et d’environ 21,6 Md en crédits de paiement (CP), dont environ 4,3 Md en AE et en CP pour le programme Infrastructures et services de transports, environ 578 M en AE et 512 M en CP pour le programme Paysages, eau et biodiversité, environ 516 M en AE et en CP pour le programme Expertise, information géographique et météorologie, environ 1,3 Md en AE et en CP pour le programme Prévention des risques, et environ 2,5 Md en AE et environ 1,1 Md en CP pour le programme Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires.

La mission Plan de relance n’a plus aucun crédit en AE, mais un reliquat d’environ 1,2 Md en CP au titre de l’écologie. Dans la mission Recherche et enseignement supérieur, le programme Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables dispose d’environ 1,9 Md en AE et en CP. Et dans la mission Sécurités, le programme Sécurité civile obtient environ 902 M en AE et environ 880 M en CP.

• Art. 172 et 173 : Le plafond des autorisations d’emplois de l’État pour 2024, exprimé en équivalents temps plein travaillé, est fixé à 35 851 pour le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Pour les opérateurs de l’État, il atteint 404 930 emplois, dont 5 171 pour les infrastructures et services de transports, 5 375 pour les paysages, l’eau et la biodiversité (dont 66 emplois supplémentaires pour les agences de l’eau), 6 574 pour l’expertise, l’information géographique et la météorologie, 1 554 pour la prévention des risques, 3 359 pour la recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables, et 22 pour la sécurité civile.

• Art. 191 et 192 : À compter de l’exercice 2024, le compte administratif ou le compte financier unique des collectivités territoriales, de leurs groupements et des établissements publics locaux de plus de 3 500 habitants comporte un état annexé intitulé « Impact du budget pour la transition écologique », selon des modalités précisées par un décret. Le Gouvernement remet au Parlement un bilan de la mise en place de cet état annexé, au plus tard le 15 octobre 2026.

Cet état présente les dépenses d’investissement qui, au sein du budget, contribuent négativement ou positivement à tout ou partie des objectifs de transition écologique de la France. Il est présenté conformément au modèle fixé par arrêté conjoint des ministres chargés des collectivités territoriales et du budget, à l’issue d’une concertation avec les associations d’élus.

De même, le budget et le compte administratif ou le compte financier unique de ces mêmes collectivités ou organismes peut comporter un état annexé intitulé « État des engagements financiers concourant à la transition écologique ». Cet état présente l’évolution, sur l’exercice concerné, du montant de la dette consacrée à la couverture des dépenses d’investissement qui, au sein du budget, contribuent positivement à tout ou partie des objectifs environnementaux, et il indique la part cumulée de cette dette au sein de l’endettement global de la collectivité, selon des modalités qui seront précisées par un décret.

• Art. 205 : Les collectivités territoriales, leurs groupements et leurs établissements publics, les services d’incendie et de secours et les associations syndicales autorisées adoptent, au plus tard au titre de l’exercice 2026, un compte financier unique qui se substitue au compte administratif et au compte de gestion, par dérogation aux dispositions régissant ces documents. Cette obligation s’applique aussi au Syndicat mixte de gestion de l’eau et de l’assainissement de Guadeloupe et à la Société du canal Seine-Nord Europe.

Une fois appliqué au titre d’un exercice, le compte financier unique se substitue de manière définitive au compte administratif ainsi qu’au compte de gestion, par dérogation aux dispositions régissant ces documents. Les documents budgétaires sont transmis au représentant de l’État par voie numérique, selon des modalités fixées par décret. Le compte financier unique est présenté conformément au modèle fixé par arrêté conjoint des ministres chargés des collectivités territoriales et du budget. Une ordonnance complétera le présent article.

• Art. 206 : Depuis 2020, le Gouvernement présente divers rapports sous forme d’annexes générales au projet de loi de finances de l’année, parmi lesquels un rapport sur l’impact environnemental du budget. À compter de l’exercice comptable 2026, ce rapport comportera une synthèse des travaux menés par les opérateurs de l’État pour évaluer l’ensemble de leurs dépenses ayant un impact favorable ou défavorable significatif sur l’environnement, selon des modalités définies par un arrêté du ministre chargé des comptes publics.

À cette fin, les opérateurs de l’Etat dont les charges de fonctionnement constatées au titre du dernier exercice clos dépassent 60 M présentent à leur organe délibérant et, le cas échéant, à leur autorité de tutelle, à l’occasion de l’adoption du budget initial et du compte financier, l’ensemble de leurs dépenses ayant un impact favorable ou défavorable significatif sur l’environnement.

• Art. 228 : Le dispositif expérimental « Mieux reconstruire après inondation », créé par le III de l’article 224 de la loi no 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021, est porté de trois ans à cinq ans. Ses modalités sont fixées par arrêté du ministre chargé de la prévention des risques naturels. Avant le 28 mars 2024, le Gouvernement présente au Parlement un rapport d’étape sur cette expérimentation, qui présente notamment le nombre de dossiers déposés et les montants qui sont alloués à ce titre par le fonds de prévention des risques naturels majeurs.

Loi no 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024

Conseil constitutionnel : décision no 2023-862 DC du 28 décembre 2023

Décret no 2023-1327 du 29 décembre 2023 pris en application de l’article 44 de la loi organique no 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances au titre de la loi no 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 (JO 30 déc. 2023, textes nos 1, 2 et 9).

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